Bienvenue !
Nous sommes ravis de vous accueillir sur le forum des pilotes privés.
Vous êtes sur un forum de discussions public, permettant aux pilotes privés, mais aussi à tous les passionnés des choses de l'air, d"échanger leurs idées, leurs expériences, leurs questions.
S'il s'agit de votre premier accès à ce site et que vous n'avez pas créé de pseudonyme, votre accès est restreint. Vous devez obligatoirement vous enregistrer avant de pouvoir accéder à la totalité des rubriques, et apporter vos contributions. L'enregistrement ne prend que quelques secondes.
Pour cela, cliquez sur l'option "M'enregistrer " dans le menu à droite ci-dessus.
Si vous possédez déjà un identifiant, indiquez-le dans la zone de saisie ci-dessous.
Nous vous remercions pour votre compréhension, et vous souhaitons de passer de bons moments sur le Forum des Pilotes Privés.
Les Administrateurs
Mon premier post (très long.........)
32 messages • Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
Mon premier post (très long.........)
de Rhoditis le Mercredi 24 Septembre 2008 17:52
Bonjour à tous,
Je vous lisais depuis quelques temps mais je ne m’étais jamais résolu à vous rejoindre. Il faut dire que beaucoup parmi vous ont une expérience du vol pour le moins intimidante. J’entre donc sur la pointe des pieds, pour ne plus avoir le désagréable sentiment d’écouter aux portes…
Mon premier post ne concernera pas la légitimité du GPS, la suprématie de telle ou telle marque de casques ou encore la compétence des pilotes avion vs ULM… Je préfère comme entrée en matière vous parler d’un petit voyage en compagnies d’amis…
Georges
+++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++
Après une dernière confirmation des prévisions météo nous convergeons vers Buzet où nos deux petits avions nous attendent. Le préposé céleste à la météo n’avait pas daigné entendre nos prières de la semaine dernière, nous contraignant à postposer, voire annuler nos projets. Nous sommes donc bien résolus à saisir l’opportunité que nous offre cette providentielle embellie. Il est précisément huit heures et le petit matin achève de se débarrasser de la brume qui le recouvre.
La veille nous avions fait le plein des trois réservoirs de 35 litres et avions nettoyé et bichonné par la même occasion nos montures. C’était bien la moindre des choses avant de leur confier nos vies et nos espoirs d’émotions nouvelles. Deux personnes par appareil, cartes et GPS à jour afin de permettre une navigation aisée, nous sommes prêts. L’absence de
contraintes de temps nous suggère de planifier des étapes courtes. Elles seront au nombre de trois et ne compteront pas plus de deux heures de vol chacune. Ces dispositions nous permettront de voyager sans fatigue.
Buzet, le petit terrain de départ, se situe au nord de Charleroi, en Belgique. Le calme de l’endroit encore endormi tranche avec la frénésie qu’il connaît certains jours d’été.
Nous sortons les deux Coyotes du hangar et procédons aux ultimes vérifications. Autant l’avouer tout de suite, je n’ai pas l’habitude du voyage aérien, ce qui explique et justifie sans doute la petite appréhension qui précède immédiatement le départ. Pendant que je gamberge, le moteur arrive à température. Nous nous alignons, poussons la commande à plein régime et décollons, aussitôt rejoint en l’air par notre compagnon de route. Notre destination : la Hongrie.
Avant d’atteindre la frontière Allemande il nous faut survoler les Ardennes Belges. Elles ont la malencontreuse idée aujourd’hui de se couvrir d’une couche nuageuse qui par endroits masque le sol. Bien que magnifique, c’est une région inhospitalière dont le relief et la végétation rendent tout atterrissage de fortune pour le moins hasardeux. « Hasardeux » est en l’occurrence un doux euphémisme. Le ronronnement familier et rassurant du moteur ainsi que la contemplation muette des formes que prennent les nuages nous font oublier notre audace. Nous savons que ces conditions sont très locales. Mon coéquipier et moi n’éprouvons aucun besoin d’échanger le moindre mot, tout baignés que nous sommes par la paix qu’inspire l’épais duvet. Il nous semble presque que nous pourrions nous y poser.
La première étape de deux heures nous mène sur un sympathique petit terrain dans l’Ouest de l’Allemagne. Michelstadt (EDFO) est une découverte. Les renseignements pris au préalable nous avaient garanti d’y trouver du carburant. La piste devait ouvrir à 10h00. Il est 9h58 lorsque nous essayons de la contacter. Rien, pas de réponse à notre appel. Nouvel essai à 10h02. La voix rassurante du contrôleur emplit alors nos casques. C’est ça la précision Germanique. Avant l’heure, c’est pas l’heure…
Le pilote de l’autre Coyote, Patrick, est un voyageur très expérimenté. J’en profiterai pour lui piquer quelques une de ses astuces. « En voyage il ne faut jamais remettre à plus tard ce que l’on peut faire immédiatement » avait-il dit doctement... A peine posés et avant même de nous précipiter vers une salutaire tasse de café, autre aide indispensable à la navigation, nous refaisons les pleins à peine entamés de nos machines. Un dicton aéronautique dit que les seuls cas où l’on regrette d’avoir trop de carburant, c’est lorsque l’on est en flammes… Nous nous rendons ensuite à la tour pour régler les formalités et verser notre obole.
L’accueil est agréable. On y décèle la ferme volonté d’aider. Il semble que malgré leur proximité, ces merveilleuses installations n’aient pas les faveurs des pilotes venus de Belgique. L’aérodrome est magnifiquement équipé et le bar est un modèle du genre. Il est, comme il se doit, décoré de mille et unes photos témoignant du dynamisme des activités et traditions aéronautiques locales. Les modèles réduits d’avions suspendus au plafond semblent avoir été figés dans leur élan. Dans un coin, un ordinateur connecté à Internet est mis à la disposition des pilotes afin de leur permettre de préparer leurs vols. Au bar, le service est tout emprunt de la fameuse rigueur Germanique. On vous écoute votre commande avec attention et on s’exécute…
Le café est salvateur et nous met d’excellente humeur… Comme pour ajouter à la convivialité, le jeune contrôleur emporte une radio portable et nous rejoint. Les visiteurs matinaux que nous sommes avaient quelque peu aiguisé sa curiosité. Nous aurions volontiers prolongé notre conversation mais déjà nous songeons au départ. Mon coéquipier est assez sensible aux turbulences et souhaitons donc profiter au maximum de l’air encore calme de ce début de journée.
Lorsqu’il nous communique les paramètres pour le décollage le contrôleur se mélange un peu les baguettes entre l’Anglais qu’il n’a pas l’habitude de pratiquer et l’Allemand. L’ensemble reste parfaitement compréhensible et ne présente aucune ambigüité. Nous saisissons ce moment de relâchement dans la procédure et du trafic réduit pour appuyer nos remerciements pour l’aimable accueil et l’excellence du service.
De mes premières années d’école je n’ai retenu que le peu qui m’intéressait. Que voulez-vous, on n’enseigne pas aux enfants les matières indispensables comme la balistique appliquée au jeu de billes, la pneumatique à travers les membranes de chewing gum, l’histoire médiévale en jouant à cache-cache dans un véritable château fort, avec un détour par la fascinante salle de tortures… Mais non, toute la science des professeurs se trouve dans les livres de classe.
Parfois je n’apprenais ma leçon que pour ne pas décevoir mon institutrice, mademoiselle Serès. Comme j’aurais aimé qu’elle fût ma passagère en ce moment, pour contempler avec moi, comme une page arrachée de notre livre de géographie, le Rhin qui serpente sous les ailes de mon avion. Mon avion… Cela a une curieuse résonnance. « Mon avion ». L’un de nos jeux favoris consistait à courir dans la cour de récré, les bras écartés, nous prenant tous pour d’intrépides as de la chasse. Nous bousculions au passage ces maladroites et délicates créatures qu’étaient les filles, qui ne présentaient décidément aucun intérêt à nos yeux puisqu’elles ne savaient même pas qui était le Baron Rouge. De plus, les collisions en vol avec elles les mettaient inévitablement en pleurs, ce qui se ne manquait jamais de faire retomber sur nous les foudres du pion. Ainsi prenaient fin nos glorieux dog fights avec privation de récréation le lendemain. Se faire descendre en flammes par le triplan du Baron Rouge, la belle affaire, mais la sanction di pion… C’est fait. La vie m’a donné des ailes mais mademoiselle Serès n’est plus dans mon univers. Et cela ternit un peu le rêve jusqu’à lui donner des teintes sépia.
Le vol de deux heures qui nous mènera de Michelstadt à cet autre petit aérodrome à l’Est de l’Allemagne, sera nettement moins confortable que la première étape. C’était prévisible. Les 12h sont maintenant largement dépassées et les turbulences mettent à mal la bonne volonté de mon coéquipier. Il est aux commandes et cela le rend un peu plus vaillant mais je vois bien qu’il lutte courageusement. Je lui parle et il m’avoue que cela atténue les effets du mal de l’air naissant. Il était temps que nous nous posions. Le terrain est plus rustique qu’à Michelstadt mais l’accueil n’est pas moins sympathique. En plus du carburant nous trouvons à nous restaurer. On ne pourrait parler de gastronomie mais nous avons très faim et avalons donc cette indéfinissable viande pannée trop grasse à mon goût sans nous poser trop de questions. La météo a résolument pris le pli de se mettre de notre côté et c’est le cœur léger que nous plaisantons joyeusement entre nous. Mon coéquipier profite de la pause pour faire une sieste réparatrice sous l’aile du Coyote. Ici aussi nous inspirons une pointe de curiosité que nous satisfaisons très volontiers. Les quelques mots d’Allemands mélangés à l’Anglais très sommaire de nos interlocuteurs permettent d’échanger des propos plus aimables qu’élaborés. Il est bien entendu question de machines volantes et de noms de villes encore inconnues.
Il n’est pas très tard et laissons G, mon coéquipier, récupérer avant d’affronter la dernière étape. Nous saluons poliment tout le monde avant de nous diriger vers nos avions. Derrière-moi court la patronne du restaurant avec une canette de boisson à la caféine. « Pour le monsieur malade » me fait-elle comprendre… Je la remercie vivement et la salue pour la seconde fois. Ce sont ces tout petits gestes désintéressés qui font qu’une journée soit parfaitement réussie.
L’après-midi est déjà bien avancé. Le plan de vol pour la traversée de l’Autriche est activé. Cette troisième et dernière étape devrait nous mener en moins de deux heures à
Pusztacsalad, (oui, moi aussi j’ai peiné avant de pouvoir prononcer ce nom), notre destination à l’ouest de la Hongrie.
A peine en vol, G. constate avec soulagement que l’air est infiniment stable. Pas de turbulences, tout au plus sent-on parfois une longue vague qui porte le Coyote sans le secouer, lui et sa précieuse cargaison. Je n’en crois pas mes yeux lorsque je consulte la vitesse/sol indiquée par le GPS. Nous volons avec des pointes de 247 km/h. Je compare au badin et constate que nous avons un vent de plus de 95km/h dans le dos. Le Coyote nous fait savoir qu’il est content lui aussi. Du haut de ses 150 heures, jamais il n’avait croisé aussi vite. Le spectacle superbe des montagnes qui défilent sous nous justifie à lui seul les efforts consentis à apprendre cette chose si peu intuitive qu’est le vol. Un moment à distiller au compte-gouttes, vraiment.
Je suis rassuré, G. est guilleret. Il sait que nous arriverons plus tôt que prévu et dans des conditions de confort qui dépassaient ses attentes. Dans moins d’une heure nous arriverons sur le terrain privé qui appartient à Iannos, son ami Hongrois. Une piste de 1000 mètres et un énorme hangar seront tout à nous pour la durée de notre séjour. L’épouse de G nous attend avec la voiture pour nous ramener à la maison, dans le village, à un petit kilomètre du terrain. Nous avons quitté la Belgique entre deux averses et ici le temps nous fait ressusciter. Nous n’attendons même pas que nous soyons au sol pour décider des projets du lendemain. Vol vers le lac Balaton, et tourisme aérien aux alentours, puis , quand nous aurons assez volé, farniente. Où faut-il signer ?
Nous venons de parcourir plus 1000 km en moins de 6 heures, sans hâte, en prenant le temps de profiter du paysage. C’était le genre de voyages que je ne faisais que dans les pages de mon grand Atlas à la couverture orange lorsque j’étais môme. Je ne l’ouvrais jamais sans me munir au préalable d’une petite règle qui allait me projeter dans les quatre coins de l’Europe et du monde. En ligne droite bien entendu. Et c’est précisément une ligne droite que nous venons de parcourir, mais je souris à la pensée des détours qu’il a fallu faire pour en arriver là.
J’avais lu que l’aviation, grande, petite ou ultra petite vous faisait découvrir des dimensions inconnues de vous-même, vous rapproche des autres. Elle fait sans doute tout cela.
Cet été elle aura en tout cas ajouté un mot à mon vocabulaire. « Köszönöm ». J’ai eu la joie de le prononcer souvent, aussi maladroitement sans doute que sincèrement.
Que ce soit en Hongrois, Anglais, Allemand, Grec ou en Papou, « Merci » est très souvent le tout premier mot dont on a besoin en voyage car on est toujours à la recherche de quelque chose.
Ce tout petit périple m’a offert ce que j’en attendais: raviver la
nostalgique teinte sépia de mes rêves d’avions en apportant des couleurs et des sensations qui rendent la réalité plus merveilleuse encore. Réalité qui sert de support à d’autres rêves d’escapades futures.
Blue skies
Georges
Quelques images dans le désordre
http://farm4.static.flickr.com/3166/2882396879_2d05794584_o.jpg
http://farm4.static.flickr.com/3110/2883230218_a6132360a5_b.jpg
Je vous lisais depuis quelques temps mais je ne m’étais jamais résolu à vous rejoindre. Il faut dire que beaucoup parmi vous ont une expérience du vol pour le moins intimidante. J’entre donc sur la pointe des pieds, pour ne plus avoir le désagréable sentiment d’écouter aux portes…
Mon premier post ne concernera pas la légitimité du GPS, la suprématie de telle ou telle marque de casques ou encore la compétence des pilotes avion vs ULM… Je préfère comme entrée en matière vous parler d’un petit voyage en compagnies d’amis…
Georges
+++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++
Après une dernière confirmation des prévisions météo nous convergeons vers Buzet où nos deux petits avions nous attendent. Le préposé céleste à la météo n’avait pas daigné entendre nos prières de la semaine dernière, nous contraignant à postposer, voire annuler nos projets. Nous sommes donc bien résolus à saisir l’opportunité que nous offre cette providentielle embellie. Il est précisément huit heures et le petit matin achève de se débarrasser de la brume qui le recouvre.
La veille nous avions fait le plein des trois réservoirs de 35 litres et avions nettoyé et bichonné par la même occasion nos montures. C’était bien la moindre des choses avant de leur confier nos vies et nos espoirs d’émotions nouvelles. Deux personnes par appareil, cartes et GPS à jour afin de permettre une navigation aisée, nous sommes prêts. L’absence de
contraintes de temps nous suggère de planifier des étapes courtes. Elles seront au nombre de trois et ne compteront pas plus de deux heures de vol chacune. Ces dispositions nous permettront de voyager sans fatigue.
Buzet, le petit terrain de départ, se situe au nord de Charleroi, en Belgique. Le calme de l’endroit encore endormi tranche avec la frénésie qu’il connaît certains jours d’été.
Nous sortons les deux Coyotes du hangar et procédons aux ultimes vérifications. Autant l’avouer tout de suite, je n’ai pas l’habitude du voyage aérien, ce qui explique et justifie sans doute la petite appréhension qui précède immédiatement le départ. Pendant que je gamberge, le moteur arrive à température. Nous nous alignons, poussons la commande à plein régime et décollons, aussitôt rejoint en l’air par notre compagnon de route. Notre destination : la Hongrie.
Avant d’atteindre la frontière Allemande il nous faut survoler les Ardennes Belges. Elles ont la malencontreuse idée aujourd’hui de se couvrir d’une couche nuageuse qui par endroits masque le sol. Bien que magnifique, c’est une région inhospitalière dont le relief et la végétation rendent tout atterrissage de fortune pour le moins hasardeux. « Hasardeux » est en l’occurrence un doux euphémisme. Le ronronnement familier et rassurant du moteur ainsi que la contemplation muette des formes que prennent les nuages nous font oublier notre audace. Nous savons que ces conditions sont très locales. Mon coéquipier et moi n’éprouvons aucun besoin d’échanger le moindre mot, tout baignés que nous sommes par la paix qu’inspire l’épais duvet. Il nous semble presque que nous pourrions nous y poser.
La première étape de deux heures nous mène sur un sympathique petit terrain dans l’Ouest de l’Allemagne. Michelstadt (EDFO) est une découverte. Les renseignements pris au préalable nous avaient garanti d’y trouver du carburant. La piste devait ouvrir à 10h00. Il est 9h58 lorsque nous essayons de la contacter. Rien, pas de réponse à notre appel. Nouvel essai à 10h02. La voix rassurante du contrôleur emplit alors nos casques. C’est ça la précision Germanique. Avant l’heure, c’est pas l’heure…
Le pilote de l’autre Coyote, Patrick, est un voyageur très expérimenté. J’en profiterai pour lui piquer quelques une de ses astuces. « En voyage il ne faut jamais remettre à plus tard ce que l’on peut faire immédiatement » avait-il dit doctement... A peine posés et avant même de nous précipiter vers une salutaire tasse de café, autre aide indispensable à la navigation, nous refaisons les pleins à peine entamés de nos machines. Un dicton aéronautique dit que les seuls cas où l’on regrette d’avoir trop de carburant, c’est lorsque l’on est en flammes… Nous nous rendons ensuite à la tour pour régler les formalités et verser notre obole.
L’accueil est agréable. On y décèle la ferme volonté d’aider. Il semble que malgré leur proximité, ces merveilleuses installations n’aient pas les faveurs des pilotes venus de Belgique. L’aérodrome est magnifiquement équipé et le bar est un modèle du genre. Il est, comme il se doit, décoré de mille et unes photos témoignant du dynamisme des activités et traditions aéronautiques locales. Les modèles réduits d’avions suspendus au plafond semblent avoir été figés dans leur élan. Dans un coin, un ordinateur connecté à Internet est mis à la disposition des pilotes afin de leur permettre de préparer leurs vols. Au bar, le service est tout emprunt de la fameuse rigueur Germanique. On vous écoute votre commande avec attention et on s’exécute…
Le café est salvateur et nous met d’excellente humeur… Comme pour ajouter à la convivialité, le jeune contrôleur emporte une radio portable et nous rejoint. Les visiteurs matinaux que nous sommes avaient quelque peu aiguisé sa curiosité. Nous aurions volontiers prolongé notre conversation mais déjà nous songeons au départ. Mon coéquipier est assez sensible aux turbulences et souhaitons donc profiter au maximum de l’air encore calme de ce début de journée.
Lorsqu’il nous communique les paramètres pour le décollage le contrôleur se mélange un peu les baguettes entre l’Anglais qu’il n’a pas l’habitude de pratiquer et l’Allemand. L’ensemble reste parfaitement compréhensible et ne présente aucune ambigüité. Nous saisissons ce moment de relâchement dans la procédure et du trafic réduit pour appuyer nos remerciements pour l’aimable accueil et l’excellence du service.
De mes premières années d’école je n’ai retenu que le peu qui m’intéressait. Que voulez-vous, on n’enseigne pas aux enfants les matières indispensables comme la balistique appliquée au jeu de billes, la pneumatique à travers les membranes de chewing gum, l’histoire médiévale en jouant à cache-cache dans un véritable château fort, avec un détour par la fascinante salle de tortures… Mais non, toute la science des professeurs se trouve dans les livres de classe.
Parfois je n’apprenais ma leçon que pour ne pas décevoir mon institutrice, mademoiselle Serès. Comme j’aurais aimé qu’elle fût ma passagère en ce moment, pour contempler avec moi, comme une page arrachée de notre livre de géographie, le Rhin qui serpente sous les ailes de mon avion. Mon avion… Cela a une curieuse résonnance. « Mon avion ». L’un de nos jeux favoris consistait à courir dans la cour de récré, les bras écartés, nous prenant tous pour d’intrépides as de la chasse. Nous bousculions au passage ces maladroites et délicates créatures qu’étaient les filles, qui ne présentaient décidément aucun intérêt à nos yeux puisqu’elles ne savaient même pas qui était le Baron Rouge. De plus, les collisions en vol avec elles les mettaient inévitablement en pleurs, ce qui se ne manquait jamais de faire retomber sur nous les foudres du pion. Ainsi prenaient fin nos glorieux dog fights avec privation de récréation le lendemain. Se faire descendre en flammes par le triplan du Baron Rouge, la belle affaire, mais la sanction di pion… C’est fait. La vie m’a donné des ailes mais mademoiselle Serès n’est plus dans mon univers. Et cela ternit un peu le rêve jusqu’à lui donner des teintes sépia.
Le vol de deux heures qui nous mènera de Michelstadt à cet autre petit aérodrome à l’Est de l’Allemagne, sera nettement moins confortable que la première étape. C’était prévisible. Les 12h sont maintenant largement dépassées et les turbulences mettent à mal la bonne volonté de mon coéquipier. Il est aux commandes et cela le rend un peu plus vaillant mais je vois bien qu’il lutte courageusement. Je lui parle et il m’avoue que cela atténue les effets du mal de l’air naissant. Il était temps que nous nous posions. Le terrain est plus rustique qu’à Michelstadt mais l’accueil n’est pas moins sympathique. En plus du carburant nous trouvons à nous restaurer. On ne pourrait parler de gastronomie mais nous avons très faim et avalons donc cette indéfinissable viande pannée trop grasse à mon goût sans nous poser trop de questions. La météo a résolument pris le pli de se mettre de notre côté et c’est le cœur léger que nous plaisantons joyeusement entre nous. Mon coéquipier profite de la pause pour faire une sieste réparatrice sous l’aile du Coyote. Ici aussi nous inspirons une pointe de curiosité que nous satisfaisons très volontiers. Les quelques mots d’Allemands mélangés à l’Anglais très sommaire de nos interlocuteurs permettent d’échanger des propos plus aimables qu’élaborés. Il est bien entendu question de machines volantes et de noms de villes encore inconnues.
Il n’est pas très tard et laissons G, mon coéquipier, récupérer avant d’affronter la dernière étape. Nous saluons poliment tout le monde avant de nous diriger vers nos avions. Derrière-moi court la patronne du restaurant avec une canette de boisson à la caféine. « Pour le monsieur malade » me fait-elle comprendre… Je la remercie vivement et la salue pour la seconde fois. Ce sont ces tout petits gestes désintéressés qui font qu’une journée soit parfaitement réussie.
L’après-midi est déjà bien avancé. Le plan de vol pour la traversée de l’Autriche est activé. Cette troisième et dernière étape devrait nous mener en moins de deux heures à
Pusztacsalad, (oui, moi aussi j’ai peiné avant de pouvoir prononcer ce nom), notre destination à l’ouest de la Hongrie.
A peine en vol, G. constate avec soulagement que l’air est infiniment stable. Pas de turbulences, tout au plus sent-on parfois une longue vague qui porte le Coyote sans le secouer, lui et sa précieuse cargaison. Je n’en crois pas mes yeux lorsque je consulte la vitesse/sol indiquée par le GPS. Nous volons avec des pointes de 247 km/h. Je compare au badin et constate que nous avons un vent de plus de 95km/h dans le dos. Le Coyote nous fait savoir qu’il est content lui aussi. Du haut de ses 150 heures, jamais il n’avait croisé aussi vite. Le spectacle superbe des montagnes qui défilent sous nous justifie à lui seul les efforts consentis à apprendre cette chose si peu intuitive qu’est le vol. Un moment à distiller au compte-gouttes, vraiment.
Je suis rassuré, G. est guilleret. Il sait que nous arriverons plus tôt que prévu et dans des conditions de confort qui dépassaient ses attentes. Dans moins d’une heure nous arriverons sur le terrain privé qui appartient à Iannos, son ami Hongrois. Une piste de 1000 mètres et un énorme hangar seront tout à nous pour la durée de notre séjour. L’épouse de G nous attend avec la voiture pour nous ramener à la maison, dans le village, à un petit kilomètre du terrain. Nous avons quitté la Belgique entre deux averses et ici le temps nous fait ressusciter. Nous n’attendons même pas que nous soyons au sol pour décider des projets du lendemain. Vol vers le lac Balaton, et tourisme aérien aux alentours, puis , quand nous aurons assez volé, farniente. Où faut-il signer ?
Nous venons de parcourir plus 1000 km en moins de 6 heures, sans hâte, en prenant le temps de profiter du paysage. C’était le genre de voyages que je ne faisais que dans les pages de mon grand Atlas à la couverture orange lorsque j’étais môme. Je ne l’ouvrais jamais sans me munir au préalable d’une petite règle qui allait me projeter dans les quatre coins de l’Europe et du monde. En ligne droite bien entendu. Et c’est précisément une ligne droite que nous venons de parcourir, mais je souris à la pensée des détours qu’il a fallu faire pour en arriver là.
J’avais lu que l’aviation, grande, petite ou ultra petite vous faisait découvrir des dimensions inconnues de vous-même, vous rapproche des autres. Elle fait sans doute tout cela.
Cet été elle aura en tout cas ajouté un mot à mon vocabulaire. « Köszönöm ». J’ai eu la joie de le prononcer souvent, aussi maladroitement sans doute que sincèrement.
Que ce soit en Hongrois, Anglais, Allemand, Grec ou en Papou, « Merci » est très souvent le tout premier mot dont on a besoin en voyage car on est toujours à la recherche de quelque chose.
Ce tout petit périple m’a offert ce que j’en attendais: raviver la
nostalgique teinte sépia de mes rêves d’avions en apportant des couleurs et des sensations qui rendent la réalité plus merveilleuse encore. Réalité qui sert de support à d’autres rêves d’escapades futures.
Blue skies
Georges
Quelques images dans le désordre
http://farm4.static.flickr.com/3166/2882396879_2d05794584_o.jpg
http://farm4.static.flickr.com/3110/2883230218_a6132360a5_b.jpg-
Rhoditis - Messages: 539
- Inscription: Mercredi 17 Septembre 2008 20:06
- Aérodrome: EBBZ
- Activité/licences: ULM
Re: Mon premier post (très long.........)
de chtikivole le Mercredi 24 Septembre 2008 17:56
Très belles photos de paysages que l'on ne voit pas si souvent. Bravo.
Merci d'avoir mis des mots sur des sentiments parfois difficiles à exprimer.
Merci d'avoir mis des mots sur des sentiments parfois difficiles à exprimer.
-
chtikivole - Messages: 107
- Inscription: Mercredi 28 Mai 2008 17:42
- Localisation: LFQO Lille Marcq
- Aérodrome: LFQO
- Activité/licences: PPL/Ahhhhh et UL'aime
Re: Mon premier post (très long.........)
de Jan TUTAJ le Mercredi 24 Septembre 2008 18:07
Il est chouette le nouveau ! Ca c'est de la balade...Et arriver au Lac Balaton, ça vous classe le bonhomme.
Un coup de Tokay ?
janek
Un coup de Tokay ?
janek
- Jan TUTAJ
Re: Mon premier post (très long.........)
de Plouchart Guy le Mercredi 24 Septembre 2008 18:27
Agréable récit et bienvenu sur le forum.
Mais sais-tu qu'il existe en France un Buzet (sur Baîze , pour être exact) dans le sud de la France , que ceux qui volent à Marmande connaissent bien et , qui , accessoirement , est un bon petit vignoble ?
Mais sais-tu qu'il existe en France un Buzet (sur Baîze , pour être exact) dans le sud de la France , que ceux qui volent à Marmande connaissent bien et , qui , accessoirement , est un bon petit vignoble ?
- Plouchart Guy
- Messages: 95
- Inscription: Vendredi 21 Septembre 2007 18:01
- Localisation: Poitou-Charentes
- Activité/licences: PPL.VV
Re: Mon premier post (très long.........)
de Rhoditis le Mercredi 24 Septembre 2008 18:31
Plouchart Guy a écrit:...
Mais sais-tu qu'il existe en France un Buzet (sur Baîze , pour être exact) dans le sud de la France , que ceux qui volent à Marmande connaissent bien et , qui , accessoirement , est un bon petit vignoble ?
Alors il faut absolument songer à jumeler les deux car à Buzet (Belgique) il y de la bonne bière...
Et merci pour le message de bienvenue.
-
Rhoditis - Messages: 539
- Inscription: Mercredi 17 Septembre 2008 20:06
- Aérodrome: EBBZ
- Activité/licences: ULM
Re: Mon premier post (très long.........)
de PatG le Mercredi 24 Septembre 2008 18:35
Bienvenue!
Patrice, pilote du Dimanche, et du Samedi parfois, aussi.
Patrice, pilote du Dimanche, et du Samedi parfois, aussi.
mon blog aéro: http://pilotaillon.over-blog.com
-
PatG - Messages: 2759
- Inscription: Vendredi 14 Septembre 2007 20:00
- Localisation: Rennes au sol, Avranches en vol :-)
- Aérodrome: LFRW
- Activité/licences: PPL(A) TW
Re: Mon premier post (très long.........)
de MICHEL JANIN le Mercredi 24 Septembre 2008 18:44
C'est que du plaisir à te lire , tu continueras dit ?
Notre bon souvenir à Mademoiselle Serès
Notre bon souvenir à Mademoiselle Serès
Tant que la boule de billard n'a pas trouvé son trou peinard
elle reçoit avec justesse des coups de bâtons dans les fesses
elle reçoit avec justesse des coups de bâtons dans les fesses
-
MICHEL JANIN - Messages: 1774
- Inscription: Lundi 17 Septembre 2007 10:25
- Localisation: 77450 Condé Sainte Libiaire
- Aérodrome: Meaux -Esbly ( LFPE)
- Activité/licences: IV
Re: Mon premier post (très long.........)
de MARTINGU le Mercredi 24 Septembre 2008 20:43
Beaux avions, belle ballade, bien raconté. Que du bonheur !
On n'est pas perdu tant qu'on ne cherche pas à savoir où l'on se trouve.
-
MARTINGU - Messages: 713
- Inscription: Samedi 15 Septembre 2007 10:44
- Localisation: Magny en Vexin
- Aérodrome: LFPT Pontoise
- Activité/licences: PPL (08/2000)
Re: Mon premier post (très long.........)
de Gordon le Mercredi 24 Septembre 2008 21:39
Ben là, pour un premier post, t'as fait fort!!
Welcome man !!
Welcome man !!
C'est parceque la vitesse de la lumière est supérieure à celle du son que tant de personnes paraissent brillantes avant d'avoir l'air con!!
-
Gordon - Messages: 2625
- Inscription: Vendredi 14 Septembre 2007 20:25
- Localisation: LFMV au soleil! Avignon pout TiTi.
- Activité/licences: PPL , Hibou, RU, VP & ULM
Re: Mon premier post (très long.........)
de aviateur bourbonnais le Mercredi 24 Septembre 2008 21:47
C'aurait été dommage que tu restes le nez a la fenetre.
Bienvenue chez nouzot'es et STP continue à nous regaler de tes histoires.
Bienvenue chez nouzot'es et STP continue à nous regaler de tes histoires.
Jean-Marie, aviateur bourbonnais
-
aviateur bourbonnais - Messages: 4578
- Inscription: Lundi 17 Septembre 2007 16:18
- Localisation: le bourbonnais, Lyon, Bretagne
- Aérodrome: LFHX - Lapalisse
- Activité/licences: Rentier, abonne au gaz, papa multirecidiviste
Re: Mon premier post (très long.........)
de pfiquet le Mercredi 24 Septembre 2008 21:52
Tu viens de réussir deux performances, en temps que pilote d'ULM belge, tu as obtenu des commentaires favorables de pilotes d'avions français.
Félicitations, ou comme dirait notre ami Billy, emigré outre-Quiévrain : "Proficiat"
Félicitations, ou comme dirait notre ami Billy, emigré outre-Quiévrain : "Proficiat"
Philippe
Protégez l'intégrité de votre ménage et de vos proches contre les réseaux sociaux indélicats
Protégez l'intégrité de votre ménage et de vos proches contre les réseaux sociaux indélicats
-
pfiquet - Messages: 5625
- Inscription: Vendredi 14 Septembre 2007 20:27
- Localisation: Charleroi
- Aérodrome: EBCI
- Activité/licences: ex-futur PPL avorté
Re: Mon premier post (très long.........)
de Gordon le Mercredi 24 Septembre 2008 21:59
pfiquet a écrit:Tu viens de réussir deux performances, en temps que pilote d'ULM belge, tu as obtenu des commentaires favorables de pilotes d'avions français.
Félicitations, ou comme dirait notre ami Billy, emigré outre-Quiévrain : "Proficiat"
Objection , your Honor
C'est parceque la vitesse de la lumière est supérieure à celle du son que tant de personnes paraissent brillantes avant d'avoir l'air con!!
-
Gordon - Messages: 2625
- Inscription: Vendredi 14 Septembre 2007 20:25
- Localisation: LFMV au soleil! Avignon pout TiTi.
- Activité/licences: PPL , Hibou, RU, VP & ULM
Re: Mon premier post (très long.........)
de toms le Mercredi 24 Septembre 2008 22:25
Ben ça alors! C'est du réçit! Et avec de belles photos en plus.
Beau voyage, beau réçit, belle photos, bienvenue!
Beau voyage, beau réçit, belle photos, bienvenue!
-
toms - Messages: 1747
- Inscription: Lundi 10 Mars 2008 19:06
- Localisation: Toulouse
- Aérodrome: Maubec
- Activité/licences: Plus que l'ULM ces dernières années
Re: Mon premier post (très long.........)
de Papa-Hotel le Mercredi 24 Septembre 2008 23:03
Bienvenue !
Super sympa ton récit !
Pour une entrée "sur la pointe des pieds" c'est raté
Super sympa ton récit !
Pour une entrée "sur la pointe des pieds" c'est raté
-
Papa-Hotel - Messages: 3078
- Inscription: Samedi 15 Septembre 2007 15:15
- Localisation: Région Parisienne
- Aérodrome: Le Bourget - Saint Cyr l'Ecole
- Activité/licences: Pilote
Re: Mon premier post (très long.........)
de Jean78 le Jeudi 25 Septembre 2008 06:43
Joli post et superbement illustré 
ps pour Papa Hotel: mon navigateur ( internet) m'a dit que tu m'as écri un MP mais je n' ai pas accès aux mp pour une raison mystérieuse
ps pour Papa Hotel: mon navigateur ( internet) m'a dit que tu m'as écri un MP mais je n' ai pas accès aux mp pour une raison mystérieuse
PPL 2009 - vole depuis pontoise ( LFPT ) et les mureaux (LFXU)
- Jean78
- Messages: 276
- Inscription: Mardi 9 Septembre 2008 13:32
- Localisation: le 78
- Aérodrome: ex Pontoise LFPT - LFXU les Mureaux depuis 2021
- Activité/licences: BB avril 09 - PPL sept 09 - ex proprio WT9 dynamic
32 messages • Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
Retourner vers En l'air, autour de ce qui vole
Qui est en ligne
Utilisateurs parcourant ce forum: Google [Bot] et 448 invités