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Re: Documentaire Mignet

Messagede gma le Jeudi 9 Juillet 2020 21:53

Pour compléter ce documentaire sur Mignet :

https://prujalaurent.wixsite.com/croses
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Re: Documentaire Mignet

Messagede Leon Robin le Vendredi 10 Juillet 2020 14:57

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Re: Documentaire Mignet

Messagede Delépine le Vendredi 10 Juillet 2020 18:02

Attention ! Le HM.8 est un avion de la formule "perte-de-vitesse-vrille-mort" !
Il faut l'oublier, c'est écrit dans Le Sport de l'air !  

Pauvre HM.8 ! Compagnon de mes rêveries ! Comme je serais ingrat en t'éliminant, si comme tous les avions tu n'étais pas taré !

Ne lisez cet ouvrage qu'à titre documentaire ! La formule Blériot, c'est tout ce qu'il ne faut pas faire !

Perso je suis impartial, ayant dessiné et fait voler des deux !
Comme Mignet ! Mais en sens inverse !
Cela ne m'a pas empêché de servir de pilote d'essai à deux Pou faits par d'autres : un proto et un HM.293. Si quelqu'un construit un Pou mais a peur de le décoller...
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Re: Documentaire Mignet

Messagede Delépine le Mardi 21 Juillet 2020 20:21

Aucun rapport avec Mignet, mais c'est pour éviter d'ouvrir un sujet pour peu.
Je fais de la publicité pour la concurrence où il y a aussi des sujets (aux deux sens du terme) marrants :

https://www.forum-ulm-ela-lsa.net/viewt ... 96&t=11974
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Re: Documentaire Mignet

Messagede gma le Mardi 21 Juillet 2020 21:20

Boutade des années 30 : "Le "Blériot" décroche en position cabré, le "Mignet" se désintègre en piqué... Choisis ton camp !"

http://inter.action.free.fr/publications/stabilite/stabilite.html
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Re: Documentaire Mignet

Messagede Delépine le Mardi 21 Juillet 2020 21:38

Centrage avant et limitation mécanique à piquer de l'aile avant = boutades qui tombent à plat.
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Re: Documentaire Mignet

Messagede gma le Mardi 21 Juillet 2020 22:08

Delépine a écrit:Centrage avant et limitation mécanique à piquer de l'aile avant = boutades qui tombent à plat.


A l'époque de la boutade, les "Mignets" tombaient comme des mouches dans l'imaginaire populaire un peu au fait de l'actualité aéronautique, un peu comme les autogires dans les années 90. Et comme il n'y avait pas d'explications "scientifique" à cet engagement en piqué (car c'était forcément à cause de la machine), il fut décidé un passage en soufflerie par le Ministère de l'air. On connaît la suite.
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Re: Documentaire Mignet

Messagede Delépine le Mardi 21 Juillet 2020 22:40

gma a écrit: On connaît la suite.


La suite quarante ans plus tard fut le passage d'un planeur à bras de type Rogallo dans la même soufflerie pour le même motif d'engagement en piqué à fort badin !

Trouvé dans un blog :

Le texte [arrêté ULM de 1986] précise que hors accessoires un ULM doit peser à vide moins de 175 kg, et que toujours hors accessoires la surface alaire doit égaler en mètres carrés au moins le dixième de la masse à vide exprimée en kilos. Or un Pou présente un double avan­tage : il est dispensé d'empennage horizontal tandis que sa formule biplane permet une surface un peu plus grande pour le même poids de struc­ture (même sans que les deux plans travaillent ensemble comme sur un biplan classique où ils sont liés). Certains ajoutent un troisième avantage, en disant compter froidement l'entreplan horizontal dans la surface portante. Par ailleurs le fuselage court est léger. Tout ceci concourt à rendre assez ai­sée la fabrication d'appareils respectant l'arrêté, alors que c'est moins facile autrement dès qu'on sort du pendu­laire. Ces années voient donc une certaine expansion des Mignet amateur. Ainsi pour certains amateurs, les mé­rites propres à la formule comptent moins dans son choix que son aptitude fortuite à suivre mieux que d'autres l'arrêté ! Ajoutons qu'un court fuselage et qu'une voilure repliable faite de tronçons brefs permettent à quelques uns de construire en appartement, frôlant parfois le drame conjugal.

Ajoutons à tout ce folklore l'ambiance [un dîner mensuel de pouduciélistes à Paris autour de 1990, rue de Charenton] agréable des environs du restaurant. On est proche du quartier des ébénistes où naguère j'ai acheté ma colle Certus rue Traver­sière chez un très ancien fournisseur pour les métiers d'art, dans sa boutique de comptoirs et de placards anciens vernissés. On croit voir Mignet passer à côté pour acheter son contre-plaqué, qu'il prenait tout près au 103 de cette rue de Charenton. J'aime sur le boulevard Daumesnil voisin les nombreuses arches basses du viaduc des Arts, avant la modernisation récente qui en bouleverse à grand renfort de verre l'aimable ca­ractère vieillot de vieux entrepôts désaffectés, lieux toujours un peu mystérieux pour les grands enfants de tout âge.

J'ai fréquenté avec plaisir ce petit monde sans adhérer pourtant à la chapelle Mi­gnet ; j'ai toutefois beaucoup appris à son sujet. Un jour donc dans ma charge de fonctionnaire dans la nature creusoise, longeant à pied la voie ferrée désaffectée al­lant à la Courtine, la grâce me touche : je ferai un Pou. Ce n'est pas tant que j'aime sans limite cette formule intrinsèquement disgracieuse et ne concordant pas avec l'image d'un avion que j'ai dans l'esprit depuis toujours ; mais en faisant un Pou, même isolé dans la Creuse je ne serai pas seul : les anciens de la popote Charenton me soutiendront mora­lement et par divers services, au lieu de regarder avec dis­tance mes projets classiques. Il faut ajouter à cela le côté indéniablement séduisant des ailes petites, faciles à faire dans de simples pièces. J'en­treprends le dessin d'un Pou qui utilisera bien entendu le JPX de 17 chevaux : il convient d'en étu­dier parti­culièrement la légèreté.

Les ailes sont de simples planches rectangulaires de cinq mètres de long sur un mètre de corde, avec profil 23014. Le fuselage sans verrière est simplissime, et re­pose sur une lame de train en peuplier contre-­collé recouvert dessus et dessous de deux millimètres d'unidirectionnel de verre. Formule simplifi­catrice inhabituelle, la cabane n'est pas en V mais faite seulement de deux mâts verticaux espacés de la lar­geur du fuselage. Il n'y a aucun hauban, si bien que les porte-à-faux sont longs et re­quièrent un longeron un peu plus massif qu'à l'habitude sur Mignet (d'où le 23014 au lieu de l'habituel 23012). L'ensemble ne dépasse pas cent kilos.

Le pire est dans les timoneries. Toujours soucieux de simplifier à l'extrême ces choses habituelle­ment complexes et chères, je les révolutionne. Il n'y a pas de manche, mais une simple poignée articulée à la place du tableau de bord absent ; elle est connectée par une biellette unique à l'aile avant, et n'agit qu'en profondeur. Sa manœuvre tord vaguement le bras et s'avère un peu déconcertante. Il y aussi un palonnier, normalement absent sur Pou ; il aura la fonction du manche en latéral, à savoir le gouvernail de direction com­mandant l'inclinaison. Comme pour simplifier encore je fais un palonnier au sens premier du mot, simple barre droite sur pivot central, le délicat contrôle latéral d'un Mignet n'en sera pas rendu plus aisé. N'ayant aucune expérience de la formule, je ne m'en représente pas du tout le caractère si chatouilleux en roulis, exigeant beaucoup de finesse du bout des doigts. Je vais donc prétendre au tour de force de prendre tout seul ma première leçon de pilotage Mi­gnet, sur un prototype, avec un système de commandes inédit et douteux : sur ces trois conditions, deux sont en trop.

Le 17 novembre 1996 le Pou de type JT.IX identifié 23BD fait ses premières lignes droites soulevées à Guéret-Saint-Laurent. Ce volateur ne fera malheureusement pas de longs aviats. Les bonds de l'appareil se déroulent tous ainsi : je n'ose pas mettre pleins gaz malgré la faible puissance, de peur d'être entraîné par surprise trop haut pour en choir sans trop de risque. En effet l'engin ne fois en l'air paraît vouloir grimper quoi qu'on fasse. Une dizaine de chevaux suffit à soulever le Pou à un mètre ou deux : la charge alaire est faible et le pas de l'hélice JPX est court. Je suis incapable en l'air de tenir la ligne droite, et l'engin dé­rive hors piste pour se re­poser comme il peut sur l'herbe après quelques décamètres de vol. Je ferai deux telles séances tandis que mes bonds anarchiques épouvanteront le club. Le pré­sident est ami d'Alain Mignet, créateur du Balérit et du Cordouan ; il me prie de le contacter avant de continuer mes jeux inquiétants. Alain Mignet ne m'apportera pas de solution miraculeuse, mais me mettra en rapport avec son oncle Pierre, fils de Henri, avec lequel j'aurai au fil des ans de nom­breux débats téléphoniques des plus cordiaux. Je constaterai en particulier combien l'héritier de Mignet est éloigné de l'étrange esprit refermé sur la formule que manifestent quelques uns de ses fervents.

J'y apprendrai diverses choses. Toujours à la recherche (absurde mais compulsion­nelle) de l'avion minimum, je n'ai pu que remarquer le HM-16 Bébé-Pou, exception­nellement ramassé et doté d'une cellule extrêmement légère. Pierre Mignet me rap­porte avoir vu son père faire un vol unique et descendre de machine en disant sans autre commentaire qu'il fallait l'oublier. Il est vrai que la vue de profil peut conduire à s'interroger sur la stabilité de route ; or je ferai un peu plus tard une expérience angoissante sur ce sujet avec un autre appareil. D'autre part l'envergure de quatre mètres suggère un plan de descente et un taux de chute ne donnant pas envie de se vacher avec.

Une autre question me tracassait avant les essais : supposons qu'en dépit du soin apporté à sa construction, il reste à mon aile une certaine dissymétrie ; comment sans ailerons pourra-t-elle être contrée en l'air ? sauf à voler direction continuelle­ment braquée au mépris de ce qui en restera d'efficacité sur le côté concerné ? Pierre Mignet me rassure lorsque je lui dis que si dissy­métrie il y a, mesurée en termes de vrillage du bord de fuite, elle reste en-dessous du centimètre. Pierre Mi­gnet en effet a rencontré un jour un Pou achevé mais non décollé présentant une horrible dissymétrie voisine de dix centimètres ; il en a fait l'essai en vol. « J'ai vou­lu voir ce que ça donnait... et j'ai vu !! » précise-t-il avec un reste d'effroi.

Mignet en appartement à Paris avant la guerre s'est construit avant tout vol de Pou une soufflerie à moteur à explosion. Les voisins de ce temps étaient compréhensifs. Il a ainsi étudié la stabilité en tangage ; mais en roulis ? Mignet s'est lancé dans un engin sans ailerons ; comment sa­vait-il que sa formule répondrait en roulis à la di­rection aussi efficacement qu'elle le fait ? Comment en a-t-il été sûr ? La question m'intéresse en tant que concepteur inexpérimenté de Pou : mon Pou à moi jouira-t-il de cette faculté, ou sera-t-il incontrôlable ? Pierre Mignet répond qu'il ignore com­ment son père s'est convaincu de l'innocuité encore non démontrée du défaut d'aile­rons.

Le professionnel Alain Mignet qui aime les relations avec les amateurs me fournira au fil de quelques années le matériel d'entoilage pour trois de mes prototypes. J'aurai surtout par le truchement d'un ami commun le plaisir de faire une visite à Saujon aux Per­rières, c'est-à-dire dans la fort belle propriété où Mignet justement construisit chez son propre père une floppée de ses élucubrations d'avant-Pou. Du sol et du ciel, le lieu est bien illustré dans le Sport de l'Air. Les Perrières abritent alors les ateliers de la société Mignet, qui toutefois fermera un peu plus tard.

Un pèlerinage m'occupera un après-midi de 2002. Où est le Bois de Bouleau, où est la vaste plaine un peu sauvage, un peu éloignée de toute activité, où Mignet expéri­menta en vol, et qui lui inspira les quarante plus belles pages de son livre, les plus chargées de poésie évocatrice ? On sait que c'est dans l'Aisne et précisément dans le triangle de routes Vailly/Condé-sur-Aisne/Chassemy qui fait trois kilo­mètres de cô­té. Je suis le tour de cette étendue de bois peu élevés, irréguliers, broussailleux, comme marécageux par zones, qui s'avère largement divisée en menues parcelles couverte de caravanes et bungalows en bon nombre. Le long du tronçon Condé-Chassemy je trouve un chemin libre permet­tant d'entrer explorer ces paquets d'hec­tares un peu hors de tout. Où y a-t-il une possible piste de plusieurs hectomètres orientée à peu près est-ouest ? Il ne semble guère exister d'étendues dégagées aux dimensions significatives, mais les arbustes ont pu tout recouvrir depuis. Enfin je déniche un endroit possible, cent mètres de large sur sept ou huit cents de long. Cette piste hypothétique dont je n'ai même pas relevé les coordonnées au GPS est aujourd'hui à mi-longueur coupée d'un clôture et d'une marche de quelques déci­mètres, mais fait figure de candidat possible. J'en fais part à Pierre Mignet qui lui non plus ne connaît pas l'emplacement exact du lieu sacré ! Les chemins sont extrê­mement bourbeux ; il faudra un véhicule des services municipaux de Chassemy pour me tirer d'un mauvais pas.

Avant même les essais de vol de mon Pou, plusieurs au club s'inquiétaient fort de l'absence de dièdre. Il existe des Pou sans dièdre et j'en ai piloté un par la suite, mais un vain peuple de pilotes de comptoir est persuadé que faute d'ailerons, c'est à un bon dièdre qu'un Pou doit de rester suffisamment stable. Il n'en est rien ! Qu'im­porte : l'opinion publique décrète que sans dièdre je ne pourrai voler. J'ai beau sa­voir que ces discours ne sont que sottise, je ne puis m'interdire de les lais­ser m'in­fluencer un peu. J'ai en novembre reçu justement l'exemplaire du Sport de l'Air que je me suis commandé. Il s'y trouve un dessin clair du manche articulé classique que Mignet s'est fait dans les années trente. Armé de cornières et tubes du quincaillier, du livre et de mon poste à soudure, j'en fabrique un que j'essaierai en décembre. Les nouveaux bonds ne seront pas plus convaincants. Et si le fuselage visiblement tor­tillard entre les deux plans gagnait à devenir plus rigide ? En avril suivant un fuse­lage plus raide ne changera rien non plus.

Je suis las, bien las de tous ces échecs. Je finis par penser que je redoute au fond de moi de voler sur une conception personnelle, et que j'ai tout simplement multiplié les raisons de douter assez de moi pour en arriver à la conclusion qu'il faut renoncer à inventer, et acheter une machine éprouvée. J'en viens à penser que j'ai plus ou moins inconsciemment fait exprès de cafouiller toutes ces années.

J'échafaude un projet double : acheter un Mignet volant déjà, et pendant ce temps en dessiner un autre qui ne sera qu'un demi-prototype : il sera largement classique et de nombreux paramètres se­ront calqués sur ceux du HM-293.

Un HM-293 à moteur 447 est précisément à vendre à cinq cents kilomètres de chez moi. Rendez-vous pris, je rencontre le constructeur/vendeur qui cherche ainsi à fi­nancer le biplace de même formule auquel il travaille. Ce biplace est un prototype où la traî­née ne manquera pas si j'en juge par le fuselage et son pare-brise qui pourraient faire un bateau de plaisance. Le train est construit tout exprès pour faire du Cx à coup de tube carré et de passages bizarres réservés au fluide aérien. Sur sa jolie base où il est garé, l'ULM à vendre est l'appareil le plus laid parmi les présents. Di­sons qu'il est franchement hideux et ne rappelle que bien confusément le 293. Il ne montre rien qui soit susceptible de faire douter de sa sécurité, mais il est si vilain que je demande quand même à le voir voler aux mains du vendeur. Les choses en l'air paraissant normales vues du sol, je conclus et reviens deux semaines plus tard embarquer l'engin.

Les ailes sont repliables à la Mignet, mais le constructeur a jugé bon de modifier le profil. Résul­tat : les axes des ferrures de longeron et de longeronnet ne sont plus ali­gnés. On ne peut replier les ailes qu'en ôtant les axes au longeronnet ; il en résulte la nécessité d'une grande délicatesse de gestes dans l'opération de repliage si l'on ne veut pas fausser les ferrures d'articulation. Il faut alors de grandes précautions d'ar­rimage pour affronter le vents relatif de la route. L'engin est tricycle, ce qui n'est pas fait pour en accroître la beauté ; juché sur ses roues et en ajoutant l'épaisseur des ailes supérieures repliées, l'échafaudage grêle sur sa remorque est im­pressionnant de hauteur. Je consacre une nuit à rentrer précautionneusement.

Le 25 mai 1997 je décolle à Guéret le Pou en début de soirée pour trente-cinq mi­nutes. C'est donc un auto-lâché sur Mignet, et je me sens aussi mal à l'aise que pos­sible de l'absence d'ailerons. Le fait est que la nervosité en roulis est considérable et qu'en dépit de l'heure la turbulence des trois cents premiers mètres m'angoisse pas­sablement. Au-dessus, l'air est calme et je m'habitue aux dé­placements latéraux in­fimes à imprimer au manche en gauchissement. L'atterrissage me surprend : la vi­tesse d'approche d'un Pou n'est pas toujours faible, car le plan avant est toujours sensiblement chargé ; mais ici j'ai l'impression d'être sinon en avion, du moins vrai­ment rapide pour la catégorie. J'explorerai tout cela. Après ce vol je découvre avoir composé par erreur mon mélange à 1% au lieu de 2.

Viennent les essais. Malgré les quarante chevaux, le poids ULM et la grande hélice démultipliée, la montée ne dépasse pas trois mètres par seconde ; la descente tout réduit n'est pas celle d'une feuille morte. La vitesse de pointe est 110 km/h, et la croisière à ce qu'on peut estimer 75% est de 99 km/h. La consommation horaire est alors de quatorze litres. La moindre réduction semble faire pas­ser au second régime ; pour quatre cents tours de moins qu'en croisière à 99 km/h, on vole peu au-dessus de la vitesse minimum tout en buvant encore 13,5 litres. A moins, on des­cend. C'est une machine à consommation ho­raire constante comment qu'on l'uti­lise.

Le réservoir tient vingt-six litres : la distance franchissable extrême vaut donc 180 kilomètres et le temps de vol extrême moins de deux heures. Mieux vaut ainsi ne pas s'égarer ni devoir trop cer­cler en attente à l'arrivée, si comme souvent à Guéret l'avion des parachutistes est omniprésent. Je compare mentalement sur ces plans l'appareil à un chasseur à réaction à simple flux en basse alti­tude : ni distance fran­chissable, ni autonomie. Je consomme 14 litres aux cent kilomètres à comparer aux 8 de mon Turbulent de jadis.

Je fais part au vendeur de ma déception au moins quant à la vitesse ; mécontent du grief, il me si­gnifie d'avoir à trimer l'aile avant puisqu'une petite manivelle est là pour cela, même si le bras te­nant le manche n'en sent pas le besoin. Une fois cette aile trimée, la vitesse de croisière passe comme je le prévoyais de 99 km/h à 99 km/h : l'aérodynamique se moque bien de savoir si ce sont les muscles du pi­lote ou bien le tab qui maintiennent la voilure à l'incidence qu'il faut. Elle donne même un petit avan­tage aux muscles, qui ne produisent aucun supplément de traînée par eux-mêmes.

L'appareil est dans les clous puisque sa charge alaire est inférieure à 30 kg/m², et qu'à l'époque cela suffisait ; la vitesse minimum n'était prise en compte et limitée à 65 km/h qu'en cas de charge alaire de plus de 30. Pourtant sa vitesse de posé reste importante et je veux comprendre pourquoi. Je procède à une pesée : 75% du poids reposent sur l'aile avant, une valeur bien excessive en dépit de l'obligation de sur­charger le plan avant d'un ca­nard. Cela donne à l'avant une charge alaire importante qui explique sans mal la vitesse au toucher des roues.  

Je volerai 73 heures en quatorze mois sur cet appareil aussi peu plaisant que disgra­cieux. J'irai à Argenton-sur-Creuse, où l'instructeur ULM se moquera sans pitié de la hideur de ma monture. J'irai la faire admirer aussi au Blanc et à Issoudun, à près de cent kilomètres : on voit que le ravitaille­ment à l'étape est absolument indispen­sable, et qu'il ne faudra pas tomber un jour sur quelque terrain désert. Je confec­tionne un réservoir annexe d'une douzaine de litres à placer derrière mes épaules, grâce auquel je pourrais sans revenir sur les dernières gouttes atteindre et contour­ner le Puy-de-Dôme. Je ferai en réalité demi-tour un peu avant.

Le premier août 1998 au décollage le régime baisse deux mètres au-dessus du sol. L'inatterrissable vallée de la Creuse m'aurait accueilli si la demi-panne avait attendu vingt secondes de plus. Je peux atterrir sur le reste de piste. L'entrepreneur ULM basé note une surchauffe attribuée à la mauvaise tension de la courroie d'entraîne­ment de la soufflante de refroidissement. Même s'il en va de ma faute j'ai assez vu cet appareil, groundé maintenant une fois pour toutes. Je serai heureux d'en re­vendre le moteur que l'acheteur fera refaire, et de livrer le reste à un feu purificateur de mauvais souvenirs.

Ma construction d'un Mignet prototype avance pendant ce temps. J'ai dit que ses caractéristiques seront fortement reproduites de celles du HM-293. J'en copie les envergures et les dièdres avant et arrière, ainsi que les entreplans horizontal et ver­tical ; je place mon séant à la même distance verticale sous l'aile avant. De tout cela devrait dériver un appareil aussi volable que le modèle qui l'inspire. Les extrémités seront toutefois rectangulaires. La surface alaire totale sera pourtant moindre, car je descends la corde de 1,20 mètre à 1 mètre seulement.

Alors que mon premier appareil respectait l'arrêté de 1986 prescrivant 1 mètre carré de voilure pour dix kilos de masse à vide, le second jouit du nouveau texte de 1998. Il ne demande plus que moins de 30 kg/m² ou moins de 65 km/h ; il n'est plus imposé de surface alaire minimum. Toutefois je m'avise en début de construction que les délais d'entrée en vigueur du nouvel arrêté en préparation pourraient m'embarrasser. Mais voici que les mensuels aéronautiques annoncent un entrée en vigueur plus rapide que prévue. L'administration locale ne semblant pas en avoir connaissance, j'appelle Paris pour apprendre qu'en réalité cette en­trée en vigueur hâtée est dans l'esprit de l'administration destiné aux constructeurs professionnels, afin qu'ils puissent mettre au point leurs nouveaux produits sans perte de temps. Cependant la loi étant la même pour tous, Paris enverra à ma DGAC régionale une lettre l'autorisant à enre­gistrer mon appareil.

J'ai soupé des moteurs à deux temps. Outre celui de mon ULM précédent, d'autres ont serré un jour tels deux des moteurs de mes trois motos MZ. Je n'entends plus voler qu'en quatre-temps. Aucun moteur à quatre temps ne m'a jamais lâché, sur la route comme en l'air, même à moto, tant du moins que l'huile a bien voulu rester à bord. Le VW est pesant mais je trouve à ra­cheter un DAF avionné avec son hélice. Il donne une trentaine de che­vaux pour une petite quaran­taine de kilos. Qui a déjà démonté un VW n'éprouve au­cune difficulté à faire de même avec un DAF, qui est visiblement à l'intérieur l'imita­tion du moteur allemand simplement réduit à deux cylindres. Le Pou torpédo prêt à vo­ler ne fait que 145 kg. Si le dièdre de l'arrière est en moyenne celui du 293, il n'est pas limité aux plans extérieurs et son angle est diminué de moitié pour concerner toute l'aile, sans brisure. Le plan central est solidaire du fuselage, et au gabarit rou­tier. Le continuité sans cassure de dièdre entre plan central et plans extrêmes per­met de fixer ceux-ci à la manière des bouts d'aile de certains planeurs, enfilant un tronçon de longeron mâle dans le longeron femelle des bouts du plan central. Tout cela est en bois ; des ceinturages de stratifié préviennent dans les parties femelles l'éclatement à l'effort. L'effort à vrai dire est faible avec des plans extérieurs ne fai­sant qu'un mètre en envergure et ne portant chacun que 13 kg par g.

Pour simplifier la cabane je songe à une paire de mâts rigides montés en V comme sur les Croses. Or c'est impossible : le centrage est tel qu'il faudrait me couper les pieds faute de pouvoir les loger ; le V derrière la cloison porte-moteur occupe la place. En d'autres termes le moteur n'est pas assez lourd pour que je puisse reculer suffisamment mon siège ; et les Croses en effet volent avec un pesant Continental, sauf l'ULM Criquet Léger à Rotax. Son moteur en contrepartie est monté au bout d'un long bâti que je n'ai pas la technique pour faire. Il ne reste ainsi qu'un moyen : exécuter deux mâts verticaux disposés dans la largeur du fuselage et accolés intérieurement à ses flancs. Le porte-à-faux de l'aile sera simple­ment plus long ; je passe en conséquence l'épaisseur relative de 12 à 14%. Les ferrures d'at­tache mât/aile relèvent d'une simplification trop longue à décrire (!), mais qui dis­pense de tout usinage.

Du 24 au 27 avril 1999 je monopoliserai chaque soir la piste de Guéret à l'heure où il n'y a per­sonne, pour multiplier les lignes droites décollées. Le début est découra­geant : comme avec mon tout premier Pou de 1996, la machine s'obstine sitôt en l'air à dévier, à quitter la ligne droite et la piste pour finir dans l'herbe. Or cela ne devrait plus arriver puisque à présent je sais manier un Pou. Je me demande s'il y a une erreur fonda­mentale quelque part dans mes dessins successifs. C'est assom­mant... une fatalité... Et puis à la mise des gaz d'une ligne droite de plus, je me dé­termine à oublier la prudence exagérée que peut-être je montre au manche ; je re­dresserai franchement à gauche, sans timidité, dès que la machine s'inclinera et dé­rivera encore sur sa droite.

Cette manœuvre évidente réussit d'emblée. Je n'ai plus qu'à faire suivre cette ligne presque droite par d'autres, volontairement de plus en plus sinueuses, bien maîtri­sées à un mètre au-dessus de la piste. Je me risquerai ensuite à gagner de la hau­teur, et passerai de délicieux moments à grimper à six ou sept mètres pour redes­cendre et atterrir aussitôt dans la longueur de la piste. Je jubile : enfin une ma­chine de mon cru veut bien évoluer dans les airs docilement à mes ordres. Je rentre le soir chez moi en flottant dans cette béatitude particulière aux créateurs qui ont réussi quelque chose. Premier vol proprement dit le 1er mai 1999. J'ai quarante-cinq ans déjà, et ma pre­mière machine volant pour de bon est des plus modestes.

Le Pou volera quinze heures sans guère s'éloigner du terrain, et bientôt je me lasse­rai de venir à l'aérodrome pour deux fois sur trois renoncer à voler à cause du vent traversier. L'affreux train tri­cycle du Pou acheté et abandonné permettait du moins de tolérer un certain vent hors de l'axe. D'autre part l'aérodynamique anguleuse ré­sultant des simplifications constructives diverses rend la croisière peu rapide. J'at­teins 85 km/h aux deux tiers de la puissance ; au moins n'est-ce qu'en consommant huit litres et non plus quatorze.
Je ferai sur ce Pou une observation curieuse. En regardant s'il est possible de piloter en profondeur sans toucher au manche, c'est-à-dire en levant le bras pour saisir le bord de fuite de l'aile articulée, je constate de la part de celle-ci une certaine réac­tion à piquer simplement lorsque j'en approche la main. La paume ouverte dix cen­timètres sous ou derrière le bord de fuite, sans aucun contact, fait réagir les 5,50 mètres d'envergure tout entiers à plonger de quelques degrés.

Le Pou ne sera brûlé que partiellement. Son aile avant perchée dans les hauteurs de ma grange en fait l'honneur, tandis que le fuselage conservé entre siège et étambot, avec moignons d'ailes, intrigue les gens de passage.

La grâce me touche comme un jour elle a touché Mignet. Il passa quelques an­nées à enchaîner les prototypes variablement invraisemblables avant de recevoir la révélation de­vant les cassons de ses échecs précédents, dont un hélico­ptère : « Construis un avion ordinaire et tu voleras ! »  et en page suivante de son livre : «  Si j'avais eu un bon petit moteur ; si j'avais suivi des directives expérimen­tées ; si j'avais opéré prudemment dès les débuts, je volerais « en amateur » depuis 10 ans ! »

Cette méditation lui fit construite l'avionnette de formule classique HM-8, son pre­mier succès. S'étant malgré cela bigorné avec, il décida que l'avion classique ne va­lait rien et inventa le Pou. J'aurai sur ce point évolué à l'inverse : constatant que le Pou malgré ses vertus ne valait pas grand-chose pour moi, pour ma psychologie, je me retourne de façon définitive vers le classique, et surtout, l'éprouvé. Cela n'ôte rien à l'affection que je garde à la formule Pou au terme d'un notable chemin fait en commun ; je continuerai d'ailleurs à voler sur un Mignet que l'on me prête de temps à autre.
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Delépine
 
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