J'avais posté ça dans un autre thread de ce forum, dans une discussion sur le parachute, mais celà me semble mieux adapté ici...
Pour ceux que ça intéresse....
J'avais un article sur le feu, sur le sujet du CAPS, et puis jamais eu le temps de le sortir... alors si vous voulez un petit aperçu...
Voici d'abord l'arrière d'un Cirrus dépiauté, avec visibilité sur le système parachute.
Les sangles extérieures sont "dans" le gelcoat de l'appareil, sous "sa peau", laquelle peau a la partie superficielle qui s'arrache littéralement pour libérer les sangles (elles passent le long du fuselage sous les portes). Il y a aussi une sangle arrière, dont on parlera un peu plus bas car elle est un peu particulière.
(et contrairement à une idée reçue, cette "peau" peut se réparer après arrachage des sangles)
Ci dessous, un zoom sur le compartiment.
Il existe à ce jour 3 générations de systèmes CAPS, les types A, B ou C, au fur et à mesure des évolutions techniques (ces 3 générations ne sont pas liées aux générations de modèles de cirrus, les premières générations, G2 ou G3... mais ont leurs propres dénominations).
Vous voyez, en haut à droite, la position de la "rocket", la fusée d'extraction, qui est ici cachée.
On est loin de la jolie fusée rouge et blanche de Tintin et sa jolie forme pointue, notre "rocket" à nous est un cylindre bien géométrique et pas très aérodynamique à première vue
Le déclenchement de la fusée est activé par le détonateur, l'actuator, situé au niveau du label A que je vous indique.
En fait, le cable d'activation est celui marqué B : lorsque vous tirez la poignée située dans le cockpit, vous tirez ce cable d'activation, comprimez un ressort (d'où l'effort nécessaire), jusqu'au point où vous allez libérer des petites billes qui retenaient un "plunger".
Celui ci va alors être libre de repartir violemment en sens inverse de votre mouvement, poussé par le ressort, ce qui va activer le détonateur via deux "firing pins" qui vont déclencher un système pyrotechnique à base de poudre à canon et de magnésium...
(c'est au niveau de ce câble B qu'on enseigne aux pompiers, par exemple, à désactiver le parachute pour éviter une sortie inopinée du parachute non activé, sur une zone d'accident, afin de sécuriser l'épave)
J'ai eu l'occasion de pratiquer une ouverture de parachute de Cirrus dans un simulateur full motion de la COPA à Las Vegas, et hormis la poignée qui était un peu trop facile à tirer, ils nous ont indiqué que les sensations du simulateur étaient très proches de la réalité.
Et celà donne une drôle de sensation de monter, puis plonger nez vers le bas en piqué (très impressionnant !), puis une drôle de sensation de se balancer comme un pendule, nez vers le bas... puis on a soudain l'arrière de l'avion qui retombe et on se retrouve à plat, au calme, en descente sous voile.
Cette drôle de sensation d'être en piqué, puis après quelques instants, d'avoir l'arrière de l'avion qui tombe, n'est pas qu'une sensation.
C'est effectivement ce qui se passe, et c'est provoqué tout à fait volontairement.
En effet, la sangle arrière du parachute est maintenue plus courte pendant quelques instants, et rallongée par la suite.
Exactement 8 secondes après le déclenchement de l'ensemble du système.
Pourquoi ?
Compte tenu de la vitesse de l'avion possible et de son inertie, un déploiement normal, avec toutes les sangles de même longueur, pourrait provoquer un départ en cabré violent, et la retombée de l'avion dans le parachute.
Donc toute la partie de sangle labellée C, ci dessus, est une partie de la sangle arrière qui va sortir initialement en restant pliée telle que, afin de rester plus courte. Le seul phénomène qui va se passer lors de la sortie, c'est que le petit bout de sangle D va être tiré, ce qui va tirer les petits déclencheurs labellés E ci dessus.
Du coup, les deux bâtons métalliques situés dans la zone F, sous les scratchs, qui sont des systèmes pyrotechniques retardants appelés line cutters, vont s'activer...
Au bout de 8 secondes (ils sont alors, avec tout l'ensemble de sangle encore pliée, à l'extérieur de l'avion), ils vont lâcher de petites lames coupantes qui vont sectionner le brin qui retient le petit anneau, au dessus, et libérer toute une série de 3 boucles métalliques situées en G. Ce jeu à trois boucles permet la démultiplication des efforts. Une fois libéré, celà libère le morceau de sangle plié et permet à l'arrière de l'avion de retomber.
On pourrait craindre que les line cutters ne soient pas assez efficaces et ne sectionnent pas bien le petit cordon qui retient le premier petit anneau, mais en réalité les line cutters chauffent tellement que rien que cette chaleur suffirait probablement à couper le brin... donc pas de panique
Ci dessous, le système des line cutters ouvert (en cours d'entraînement au remplacement des éléments pyrotechniques), et un line cutter déclenché, ouvert pour montrer l'intérieur.
On voit bien aussi, au dessus des line cutters, le détail des anneaux imbriqués.
Si la fusée du parachute elle même ne se change pas souvent, et ne peut être manipulée que par des techniciens spécialement formés, les line cutters, eux, sont changés plus fréquemment lors des entretiens.
Dans les autres détails...
La fusée est très puissante et l'extraction violente, car il faut que le parachute sorte le plus vite possible.
Pour les amateurs de pyro, c'est une fusée ammonium-perchloride, et elle atteint 150 MPH en deux secondes, et part à une distance de 2 miles de l'avion...
La fusée, lorsqu'elle part à travers une zone volontairement fragilisée du dos de l'avion, embarque du bout du nez un anneau (collar), lequel est retenu par des "breakaway screws" à savoir des vis-fusibles qui sont faites pour céder à ce moment là, et permettre à la fusée d'emmener le collar avec elle.
(Il y a eu d'ailleurs, lors d'une visite d'un Cirrus dans un atelier agréé par le constructeur, des découvertes assez limites par ces derniers... "d'améliorations" faites par le passé par des mécaniciens apprentis-sorciers, qui jugeant ces vis "pas assez solides", les avaient remplacées par du "bien solide"... je vous laisse imaginer le résultat si le pilote avait eu besoin de déclencher ! On ne le dira jamais assez en mécanique... si tu connais pas, tu touches pas !!
)
Bref, ce collar embarque avec lui le sac du parachute, via une longue sangle appelée "incremental bride". Le sac sort d'abord sans que le parachute ne s'extrait, et c'est en bout d'extension, lorsque la fusée a atteint la vitesse max, que la bride va alors jouer un rôle important.
Celle ci est dans un nylon spécial extrêmement solide mais légèrement élastique, par un astucieux système de points d'arrêt (bartack stitches) qui vont céder lors de l'extension, ce qui lui permet d'absorber en le repartissant, une partie du choc de l'extraction/ouverture, pour permettre une sortie progressive du parachute et lui éviter la destruction du fait d'une extraction/ouverture trop violente.
Sur le dessin ci-dessus, vous voyez la zone où la sangle est plus courte tandis que les line cutters à 8 secondes font leur travail...
Vous voyez aussi l'incremental bride, la sangle qui est embarquée par la fusée.
Un autre détail intéressant est le slider ring, littéralement "l'anneau qui glisse", ce petit anneau qui coulisse le long des suspentes permet de rendre l'ouverture du parachute plus progressive pour les occupants de l'avion. La force est aussi absorbée en partie par les sangles latérales, qui s'arrachent de la peau de l'avion (on voit leur chemin sur le dessin).
La fusée, elle, avec la bride et le sac vidé de son parachute, vont continuer leur course de leur côté, loin de l'avion...
Bon, voilà pour un petit aperçu du fonctionnement de ce parachute, fonctionnement que je trouve exceptionnellement bien pensé et simple (et je n'ai pas de commission pour vendre ni Cirrus, ni parachutes
).
Si vous voulez voir une vidéo sympa :
http://www.youtube.com/watch?v=i_B--xSUxBAAlexandra