Réglage "LOP" : Domaine d'application et périmètre d'application.
Toutes les machines thermiques ne sont pas concernées par le réglage "LOP" de la richesse.
Les moteurs à cycle diesel sont "naturellement" LOP, puisque en fin de cycle la combustion (et non la détente après explosion) s'achève faute d'oxygène.
Ce qui a longtemps été néfaste au cycle diesel, c'est la qualité du carburant et une injection différenciée, parfois excessive, qui ne permettait pas le brûlage des suies et autres particules en fin de cycle moteur, d'où la production importante d'oxydes d'azote et le rejet d'imbrûlés. Grâce à l'injection haute pression, grâce à des injecteurs pilotés électriquement plutôt qu'à ouverture automatique au seuil de pression, l'injection directe s'est améliorée et ces problèmes d'émissions polluantes ont été en partie résolus... Mais il faut alors toute une technologie d'automatismes fiables... Souvent sans mode dégradé (ou alors il faut en faire un artificiellement), c'est l'évolution du diesel automobile de ces dernières années que l'on connaît tous.
Dans l'intermède "électronique", il y a eu des travaux intéressants pour "contenir" les émissions polluantes et les chocs mécaniques des diesels à injection. Le passage en injection indirecte (travaux de Monsieur Ricardo) dans une chambre intermédiaire fait partie de cette épopée, il y a eu aussi le diesel "hyperbar".
En aviation, le réacteur (qui est un "cycle diesel continu") a utilisé la "dilution" et le passage en double flux (froid + chaud).
Ce qu'il faut retenir, c'est que si le "LOP" permet une bonne combustion du carburant amené par excès (cas de l'injection différenciée) et la réduction des températures de fonctionnement, il génère un autre problème : le rejet d'imbrûlés métalliques et ses dérivés qui ne se fixent pas sur les parties du moteur, mais qui n'ont pas été détruites par pyrolyse pour autant. En automobile, c'est le rôle de la catalyse des gaz faite après coup, dans un "catalyseur" implanté plus loin sur la ligne d'échappement... Ce qui ne se fait pas en aviation.
Je vous renvois à cette étude intéressante, car elle permet de comprendre qu'en aviation, là ou on combine essence plombée, température de flamme élevée, taux de compression élevés, le réglage "LOP" (donc inférieur à un rapport de mélange de 1) fait entrer dans la zone dangereuse des oxydes d'azotes tel que le diagramme de Kitamura la définie. "LOP" est parfait avec un carburant "propre" et des température de flamme moindre (maxi 1400°C), donc une richesse, ou plutôt une pauvreté plus proche de 1 que de 0,8. En gros, se limiter à LOP 25 à 50 °F, plutôt que viser des LOP à 100°F.
https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01341666/documentEn automobile, il existe des degrés de dépollution des moteurs : A = réaspiration des gaz de carter ; B = A + Allumage électronique ; C = A+B + Recirculation des gaz d'échappement (EGR); D = A+B+C+ Taux de compression réduits (USA Fédérale) ; E = A+B+C+D+ Réaspiration des vapeurs d'essence (USA Californie) ; Z = A+B+C+D+E + Coupure d'alimentation à la décélération + Catalyseur (Suède, Suisse, Australie, Japon). En aviation, on est pas encore au stade B...
C'est le premier problème avec le discours des pros "LOP" : Oui il y a moins de dépôts et d'encrassement du moteur... Donc c'est très bien... Mais où sont-ils passés puisque l'abaissement des températures ne permet pas leur pyrolyse en fin de détente. Sauf à réclamer un carburant propre (sans plomb, sans potassium, sans... Tous ce qui limite la détonation), il n'ont qu'une alternative de réponse pour l'instant : La catalyse.
Faute de catalyse, le carburant "propre" contraint à l'abaissement des taux de compression... Donc à un dosage forcément plus riche... Voilà pour l'instant la limite de domaine du réglage "LOP" en aviation.
Ce n'est pas une mince affaire à régler puisque la demande actuelle est d'abord environnementale. Pour le fond de commerce, les partisans du "LOP" sont un peu forcés de réclamer un carburant propre, une technologie d'injection avancée, une surveillance moteur plus poussée, voir l'introduction de catalyseurs. Or tout ceci à un coût... Qu'il faut mettre en parallèle avec le prix d'un moteur neuf en fin de TBO (la solution extrême).
C'est pourquoi les motoristes ne militent pas dans leur domaine de fabrication pour le réglage "LOP" de la mixture.
En automobile, avec la fin programmée du moteur diesel, le moteur essence à explosion passe à nouveau sur la table d'opération, cette fois pour des contraintes environnementales, et si l'utilisation "LOP" n'est pas discutée, tous les travaux vont aller dans le sens d'une réduction des émissions polluantes. A 20 000 moteurs /jours, l'industrie automobile peut sans problème prendre en charge les coûts de développement voir la R&D de nouveaux produits.
Même avec 15000 moteurs par an, les géants industriels Teledyne et Textron ne peuvent supporter ces coûts. Avec 25000 moteurs en 30 ans, Gami et consorts sont dans l'impasse. La solution est donc forcément celle issue de l'industrie automobile.
Pourquoi l'injection est un facteur aggravant ?
Dans un carburateur, c'est l'air passant dans un venturi qui aspire une quantité de carburant, elle se vaporise et, si possible, s'homogénéise à l'air pour former un mélange prêt pour entrer dans la chambre d'explosion.
Le dosage de cette essence s'opère par le passage dans un trou calibré (le gicleur), en théorie, ce passage devrait être variable pour tenir compte de la variabilité de pression d'admission et de température de l'air.
Ceci car le mélange idéale est "massique" et non "volumétrique".
Dans la pratique, et pour simplifier (coûts de construction), on fabrique des carburateurs à un ou plusieurs corps, avec ou sans membrane, fonctionnant ou pas à la pression atmosphérique et, le plus important, à un ou plusieurs gicleurs.
Si on était puriste, il faudrait tous les matins aller calibrer le trou de passage du gicleur pour l'adapter au conditions du futur vol... C'est juste pas possible.
L'architecture moteur compte... Si vous regardez un "radial", vous constaterez que le ou les carburateurs est au centre, que toutes les pipes d'admission sont quasi identiques... On peut supposer à pertes de charge identiques.
Maintenant, si vous regardez un 4 ou 6 cylindres à plat ou en ligne, vous constaterez que ce n'est plus le cas.
Sur certains moteurs Lycoming en particulier, vous pouvez aussi constater que le passage d'air d'admission se fait via une chambre dans la bâche à huile...
Ces imperfections de construction altèrent la distribution du mélange gazeux et la précision du dosage. Or le réglage "LOP" de la richesse c'est quelques degrés du côté pauvre du maxi EGT. Dans la pratique, l'écart entre cylindres peut générer un fonctionnement dans les pires conditions pour l'un, une situation idéale pour l'autre. Si le carburateur permet un dosage assez précis du carburant, c'est le passage tumultueux de ce mélange dosé dans les pipes qui contrarie ensuite la bonne diffusion.
Si on regarde alors la solution d'injection, qui est pour encore une majorité des cas "multipoint" en aviation, tout se fonde sur un dosage "massique" du carburant via une "pesée" de la quantité d'air passant dans un "doseur".
C'est un dérivé de la technologie Allemande d'avant guerre, très utilisée par Bendix et consorts, soit le système "RSA". Petite page d'info sur ce système ici :
https://www.aircraftsystemstech.com/p/fuel-injection-systems.htmlOn connaît bien en automobile ce truc puisque, très utilisé et diffusé par BOSCH dans les années 70-80, c'était la succession heureuse de l'injection mécanique (Kugel Fisher pour les plus connues).
En automobile, l'inconvénient c'était la variation de la pression d'essence pour réaliser le dosage. Bosch a donc électrifié la base, ce qui est devenue une injection "électro-mécanique" (pesée de l'air et dosage mécanique + alimentation et régulation d'arrivée carburant électrifiée (pompe, régulateur, soupape de départ à froid, injecteur départ à froid). C'est connu sous le nom "K Jetronic". Quelques temps après, c'est devenue tout électronique et monopoint (1985).
En aviation, il y a eu un essai, c'est le moteur TCM "Tiara" à double pompe électrique fonctionnant en permanence... Quelques-uns doivent se souvenir des règles de la conduite moteur...
Le réglage "LOP" est difficile avec cette technologie de base multipoint car l'imperfection intrinsèque du doseur (pas de régulation précise de la pression carburant, pas de précision suffisante du plateau sonde) fait que la quantité d'essence donné au moteur est toujours excessive. Inutile de préciser, je pense, qu'il s'agit d'une injection continue en fin de pipe d'admission (juste avant la soupape).
La solution GAMI, alternative heureuse, c'est l'injecteur à débit contrôlé et pression d'ouverture tarée. Il fait office de "régulateur" (mais normalement ce n'est pas son rôle car en fin de ligne) et il diffuse plus lentement que l'injecteur d'origine. Cela ne change toutefois pas le fait que si la quantité de carburant donnée à cet injecteur n'est pas bien dosée, peut importe le temps mis pour diffuser, il y aura, à la fermeture soupape, toujours trop de carburant donné au cylindre.
Pour compenser ça, GAMI travaille aussi sur le distributeur central (visible sur le haut d'un Lycoming par exemple), dont il calibre le réglage et les sections de passage. C'est du très bon travail, mais c'est encore une fois un palliatif puisque cela ne change pas le mauvais pesage de l'air et le mauvais dosage du carburant.
En fait, dans un travail formidable et acharné, GAMI a juste pour l'instant affiné la distribution du carburant aux cylindres et diffusé plus lentement l'injection.
Le reste à faire est colossal puisque, pour régler toutes les imperfections, il faudrait harmoniser les pertes de charge du réseau "air" (pipes d'admissions de forme et longueur différentes), contrôler la turbulence dans ce réseau, la température (TCM). Sur le réseau carburant, la régulation de pression, de débit, de température, car on "pèse" l'air mais le dosage carburant se fait par variation d'un débit commandé par le plateau sonde (celui pesant l'air).
En fait, recertifier le type moteur avec un nouveau système d'injection électronique serait plus facile...
Dans les malheurs il y a toujours un point positif, c'est qu'on peut agir globalement sur le dosage avec le système RSA d'origine.
Entre plateau sonde et doseur carburant, il y a un levier avec vis moleté qui vous permet d'ajuster la quantité de carburant donnée par quantité d'air pesée. Cette vis est là pour ajuster le dosage en cours de vie du moteur et si vous êtes un propriétaire, utilisateur et pilote connaisseur de sa machine, vous pouvez globalement agir sur le dosage pour limiter l'excès.
Il faut toutefois se rappeler qu'il y a une grande disparité dans les pipes d'admission, que les cylindres ne sont pas tous usés de la même façon. Donc si vous touchez à ça, c'est que vous êtes en mesure de vérifier les compressions, l'allumage et la distribution.
J'ai évoqué pour le cas automobile, l'indice de dépollution "C" qui consiste, pour des moteurs déjà dotés d'une réaspiration des gaz de carter (A) et d'un allumage contrôlé (électronique)(B), à monter un système de recirculation des gaz d'échappement (EGR). L'EGR est le système parfait pour un fonctionnement permanent en "LOP", quelque soit la pression d'admission et quelque soit le régime.
Adopter "EGR" en aviation c'est la possibilité de régler riche avec un carburant sans plomb puis de réincorporer dans la chambre en cours de détente des gaz imbrûlés limitant la température de flamme. En gros, revenir aux solutions automobiles du début des années 70 et pour lesquelles les USA étaient précurseurs (essence sans plomb en 1967, indice "C" en 1973, "D" 1974 en Californie).