Je possède un "F", actuellement en GV (moi qui fait), et j'utilise un "ovation" en attendant. J'adore cette machine, je vais donc vous donner un avis de "proprio partiale"... En étant le plus impartiale possible
(croix de bois, crois de fer, si je....)
Il faut juste retenir que, depuis le début, ce qui motiva le créateur c'est : "voler haut, vite et loin !"... Que depuis 60 ans que la machine est construite, elle a peu évoluée (sauf l'équipement) et que c'est toujours avec cette philosophie que les améliorations furent entreprises.
De ce fait, si vous souhaitez utiliser cette machine pour quelques balades locales le dimanche, les tours de piste répétitifs, le vol décontracté... Oubliez !... Car vous serez forcément déçus.
Le Mooney M20 fait partie des "avions complexes", vous devez être familiarisé avec train rentrant, pas variable, volets de capot... Mais aussi finesse, gros effet de sol, petite garde au sol... Pour les adeptes de l'IFR, méfiez vous des Mooney non dégivrés... Car les perfs font que vous allez forcément flirter avec l'iso 0 et connaitre quelques soucis... Ce n'est pas représentatif, mais je pense qu'il faut attendre de loguer quelques 200 h pour pouvoir commencer à être à l'aise dans la machine.
Un avion moderne en plastique peut parfois être sous motorisé malgré ses 300 cv... Le Mooney est bien motorisé avec juste les 200 cv des premières versions, ne pensez donc pas que les premiers M20 sont forcément poussifs.
Choix d'un modèle :
Si vous n'êtes pas mécano dans l'âme (et part 66), oubliez les "A", "B" et j'oserais dire les "C" (Ranger)... Il faut connaître ces machines, être actifs dans leur entretien, sinon ils seront "ruine-budget" pour un particulier non mécano. Ces machines sont CdN OACI, il y a donc un suivi conséquent à faire alors que plus guère de pièces disponibles...
Le "E" est la première option possible, la fabrication débute en 65, il est courant en Europe sur le marché de l'occasion. Si vous êtes puriste, choisissez le modèle avec le pare brise en deux pièces (avant 69), le train manuel (Johnson bar), les volets à commande hydraulique... Pour tous, c'est IO 360 (injection) et hélice Hartzell. Toutes les machines sont pourvues, à l'origine, d'un ingénieux système de pilote automatique dit "positiv contrôl" (PC), deux axes, actif en permanence (il faut désactiver par un poussoir sur le manche pour manœuvrer). Il y a peu de CN ou AD pour ces machines, elles sont faciles d'entretien.
Le "E" est un Mooney à fuselage court, les places arrières sont exiguës, comptez 140 à 160 Kts en croisière et entre 10 et 13 Gls/h. Le régime économique se trouve entre FL070 et FL 100, "Ram air" open, 22 à 24 de Map et 2400 tr/min (éviter de descendre en deçà de 2350 avec l'hélice Hartzell (traces de fatigue aux pieds de pales).
Le "F" est un "E" amélioré, avec un fuselage un peu plus long (ma préférence), début de fabrication en 1966. L'allongement du fuselage lui confère un peu plus de stabilité en tangage (trop diront les adeptes du "E"
), plus de places à l'arrière et une vrai soute à l'arrière. En prime, vous avez les sièges arrières "couchette"... Mais une plage de centrage délicate (eh oui). La finition luxe est "Exécutive 21". Même motorisation que le "E", l'appareil recevra en cours de série la commande de train électrique et le "positiv control" amélioré (qui n'est autre que le système Brittain LSA 4). Très peu de "F" sont disponibles en Europe, il est une perle rare.
En 69, Mooney sortira le "G", qui est en fait le "F" mais à moteur 180 cv carburateur, c'est la version "Statesmann".
Jusqu'en 77, ces trois dernières versions vont peu évoluer, quelques "STC" changent des détails (pare brise monopièce, nouvelles entrées d'air sur capot moteur, couvre joints sous ailerons).
Pour ces trois versions, les points faibles sont :
-commande du train avant (jeu pouvant conduire au shimming), une CN existe pour le remplacement périodique du boulon...
-train d'atterrisage (graissage périodique requis)... Sinon les contrefiches ne se verrouillent pas bien en sortie (notamment roulette de nez)...
-étanchéité des réservoirs structuraux (un point faible pourtant très facile à reprendre). Il existe une CN pour les bouchons (la chaînette de retenue du bouchon à démonter) sinon elle accroche la jauge et fausse l'indication de niveau, et une CN pour ceux qui montent des vessies O&M...
-biellettes de gauchissement (surveillance de criques ttes les 500 hrs)
Mes conseil pour l'achat :
-Vérifier l'absence d'odeur d'essence dans l'habitacle (fuite aux nervures d'emplanture), l'absence de traînées bleuâtres dans les cavités de roues derrière le longeron d'aile (fuite des réservoirs),
-Train avant, voyez si l'avion est équipé du nouveau "stering horn" vendu par Lasar (une pièce mécano soudées remplace la biellette de commande),
-Constater de visu si accidenté (posé sur le ventre) via bords de fuite des volets à l'emplanture (érosion), events de bac à batterie érodé,
-Vérifier que le bâti moteur est renforcé (goussets soudés sur les tubes verticaux) pour les moteurs Lycoming,
-Moteur en marche, vérifiez le fonctionnement du "turn coordinator" (Brittain TC 100 pneumatique), en le commandant, les ailerons doivent bouger (si système d'origine),
-Si encore ADF, contrôlez impérativement le tendeur de l'antenne "levée de doute" avant votre vol d'essai (certains montages sont des tendeurs élastiques, non des ressorts) sa rupture en vol transforme votre antenne filaire en fouet au moment de l'approche, et arrache l'antenne VHF en plus d'abîmer l'arête dorsale.
-Vérifiez l'absence de jeu aux volants de commande (CN répétitive).
-Les premiers 40% de la corde d'aile sont dotés de rivets tête fraisée (profil laminaire), il est impératif de distinguer les têtes sous la peinture... Sinon cela suppose la présence d'un mastic de réparation.
-Si avion couche dehors, vérifiez la présence du drain en bas de gouverne verticale, il évite l'accumulation d'eau de pluie (jusqu'à 2 l possible...),
-Sur toutes les versions, vérifiez le compas... Il existe des malins qui chargent la ou les batteries via la prise allume cigare, ce qui, sur un Mooney, magnétise la structure en tube soudés... Je vous laisse deviner la suite !
-Vérifiez l'étanchéité cabine, notamment aux abords du "Karman" d'emplanture, cela consiste à vérifier si l'isolant derrière les garnitures avant est humide ou a connu l'humidité (corrosion des tubes de structure possible).
Le "F" sera remis sur chaîne en 74, il va donner naissance au "J" (nouvelle planche de bord) qui est décliné en 2 versions connues : le "201" et le "205" (qui est la Ktas de croisière possible au plafond maxi). Même moteur 200 cv injection, mais il existe un STC "turbo"... Suivrons "K" ("231" et "252 TSE ou TLS" (le "K" est le plus prisé des officionados)), avec nouveau moteur continental 270 cv (Le "K" permet 252 Ktas à 24000 ft)... Puis "L" (encore), "M"(Bravo) avec moteur PFM 3200 (que je déconseille car difficile à maintenir en service), puis "O", "P" et "R" (ovation).
Depuis "K", les séries "ovation", "TLS" et "Bravo" ont été remaniées, jusqu'à l'arrêt momentané de la chaîne en 2008. En 2011, Mooney a repris la fabrication de l'ovation et remanié le "T" devenu "TN".
Maintien en service :
C'est plus un avion de propriétaire qu'un avion de club, car même si la machine est très saine et très agréable à piloter (bien trimée), elle reste exigeante (tenue des paramètres)... La cellule est robuste (habitacle en structure de tubes soudés doublé d'une peau en 2024), il y a peu de CN ou d'AD, celles qui existent sont peu contraignantes.
Il y a deux familles de Mooney, ceux qui se sont posés sur le ventre, et ceux qui vont se poser sur le ventre... Mais on sait pas quand !...
Encore une fois, pour les modèles anciens, le statut de "pilote propriétaire" est très utile, il faut peu d'outillage pour aller jusqu'à la prise en charge des GV (2000 h/4 ans). Côté moteur, les IO 360 sont robustes, la plupart des CN des anciens blocs sont levées via les GV actuelles (notamment celles sur les culbuteurs).
Les premiers Mooney demande une surveillance de la CHT en montée (cylindre 4)... Surtout s'ils reçoivent une hélice tripale au lieu de la bipale d'origine, c'est ce point qui motiva la création d'un BS spécifique. Pour les versions récentes, il y a en France un distributeur de la marque qui fait un bon travail, le coût peut paraître prohibitif au premier abord, mais un suivi de nav dans ce cadre agréé permet un renouvellement à 4 ans du CdN, contre 1 an hors cadre agréé. Omis les dernières versions, le Mooney n'a pas de CdN Easa, il reste donc CdN OACI, les pièces constructeurs sous 8130 sont requises, l'entretien est déclaratif lorsqu'en "Novembre". En "Fox", il est impératif de privilégier l'entretien "hors cadre agréé"... Même si vous confiez les travaux à un atelier sous part F ou G... Il faut juste déclarer un programme d'entretien à l'autorité de surveillance, ce que permet le canevas du constructeur.
Utilisation :
Les meilleures performances sont... Vent AR 100 Kts, finale 80 Kts... Sauf qu'il va falloir faire des circuits longs... C'est long pour décélérer un Mooney... La minute d'éloignement n'est pas de trop...
A l'arrondi, si le sol ne vient pas, n'insistez pas, vous n'avez que 7 cm de garde à l'hélice, au touché du train avant... Donc prévoyez plutôt des remises de gaz... C'est le posé complet qui est une option...
Préparez vos arrivées... Le passage d'un réservoir à l'autre sur un "E" ou un "F", avec robinet devant le siège gauche, n'est pas aisée... Et ce passage G/D suppose un passage par "OFF"... La nuit, ce sélecteur est éclairé... Mal éclairé !
Les premiers modèles ont une sortie de secours du train, via une manivelle située à gauche... La sortie complète c'est environ 60 tours... Et pour confirmer la sortie et le verrouillage, une petite fenêtre de plexiglas, sur le plancher, ou vous devez voir un repère de couleur vert aligné sur un curseur... Bien sûr, la nuit c'est pas éclairé...
Ces particularités font que les pilotes des "premiers" Mooney, attachés à leur machine, sorte le train bien avant d'attaquer le plan en finale... En plus de l'utiliser comme "aérofrein". Vous voyez également l'attachement qu'on certains pour la "Jonhson bar"... Bien plus rapide et bien plus sûre.
Les derniers sont très souvent "full de ice", avec petite lampe de surveillance de bord d'attaque et tout et tout... Mais bon !... C'est un quadriplace de moins de 2700 Kg, évitez les zones de givrage car, en cas d'accumulation, il y a blocage de la profondeur au niveau des masses d'équilibrage des gouvernes... Seul le trim restera actif (articulation du bloc d'empennage tout entier). A l'inverse de quelques autres avions, le Mooney permet d'espérer une sortie par le haut...
Vous l'avez compris, le Mooney est un avion plein de super défauts, exigeant, pas vicieux (même plutôt bonne patte)... On s'y attache, vraiment !... Et il le rend par des performances très très honorables avec un coût d'utilisation très convenable.
Bref !, c'est un super zinc.