4 oct. 1985 : souvenirs....

[bernard.boin]

Cahors, le 4 octobre 1985

17 H – L’automne est merveilleux. Depuis 2 mois c’est le grand beau.

j’ai rendez-vous avec mon ami Marc pour ramener un Cessna 182  F…. à Lyon. Toute la semaine il a visité ses clients dans le Sud Ouest et m’a proposé de le rejoindre pour le voyage de retour. Ce matin j’ai pris  l’avion pour Toulouse et le train jusqu’à Cahors. Que ne ferait-on pas pour faire un vol de nuit !

Dans le train cependant, j’ai vu du coin de l’œil  des cumulus se former. Toujours optimiste, je pense  qu’avec le soir et la fraîcheur, ils vont se résorber.

17h30. je prends la météo. Le prévi prévoit une ligne d’orage de Bayonne à Strasbourg. Le front avance à 20 km/h. Si vous partez maintenant, me dit-il, vous aurez une route parallèle au front. La navigation est des plus simples : de Cahors rejoindre la G5, le VOR de Mende et direct Lyon. Durée du vol 1h30.

18 h – avec ½ heure de retard, Marc arrive. Dépôt du   plan de vol IFR. Départ 18 h30 local.
18 h30 – la nuit est tombée. Mise en route.
Marc m’a installé d’office en place gauche. Je vais avoir le plaisir de piloter ce bon Cessna 182 avec ses 235 CV. Il est full IFR. Cela me change du Rally.
Je connais Marc depuis longtemps. Il vit à NY  et possède un Rokwell 112 avec lequel il parcourt les Etats-Unis. Evidemment il est IFR,  pilote de ligne,  et  possède plusieurs traversées de l’Atlantique à son actif, en monomoteur et bimoteurs.  En janvier nous avions fait quelques vols aux USA.

Pendant que Marc prend la clearance, j’arrive au seuil de piste. Briefing classique  avant décollage et petite remarque (comme nous n’avons pas ni radar, ni stormscope)  : en cas d’orage, si tu vois un éclair sur ta droite, tu vas à gauche et vice versa. C’est la seule solution pour éviter la foudre.
Je mets la ceinture et le baudrier bien serrés……

TS.prêt pour alignement et décollage. Je règle mon conservateur de cap. C’est parti.

Décollage on quitte Cahors et on passe avec Bordeaux.
Je branche  le PA et commence ma montée vers le FL70.
Soudain un éclair, une cataracte d’eau s’abat sur l’avion, le pare-brise se couvre d’une pellicule d’eau. Ça promet !!!!Marc pousse l’hélice plein petit pas, tire le réchauffage carbu,  branche le Tube Pitot et ferme les volets de capot.
Les turbulences commencent à tordre les ailes. Les rafales de pluie de plus en plus violentes fouettent les revêtements, forçant sur les ailerons et le manche.
Je débranche le PA. Maintenant c’est la grêle. Le vario semble pris de folie. Il se bloque à +2000 et -2000 pieds . La vitesse passe de 60 à 160 nœuds et l’altimètre tourne comme un fou. Je reçois des G négatifs, car mes pieds ne touchent plus le palonnier. On est en pleine galère.

Les éclairs se succèdent maintenant et ça part dans tous les sens. Autant vous dire qu’il n’est plus question  de garder un cap et une altitude. La situation est devenue ingérable. Le contrôleur de Toulouse s’inquiète pour les avions de ligne qui percent sur Toulouse. Il nous prie fermement de reprendre notre route et de garder notre altitude. C’est impossible car nous tournons en rond. Le DME de Mende est scotché à 60 nts.
Heureusement nous sommes 2 à bord et Marc m’aide au manche. Par moment nous prenons 40 à 60° d’inclinaison. Le bruit est infernal. Nous voyons comme  en plein jour.
Sous la pression,l’eau commence à suinter par les joints du pare brise.  Ma grande peur est de voir le pare brise exploser sous la violence des grêlons.

Il faut sortir de là. Je commence à fatiguer. Les  muscles des avants bras sont douloureux de serrer le manche Je sais qu’il faut  prendre plein est pour se récupérer sur la vallée du Rhône car les orages vont rester coincés sur les Cévennes. Le contrôleur n’est pas d’accord sur notre stratégie et nous devons discuter ferme. Enfin de guerre lasse, il nous autorise  à  passer  sous le contrôle militaire d’Istres.

Ce dernier  nous prend sous son aile et nous donne des caps  à suivre en fonction des points d’impact de la foudre qu’il voit sur son radar. Malgré la grêle, la pluie,  les éclairs et la fatigue,  le moral remonte d’un cran. Nous ne sommes plus seuls. En plus il nous annonce que nous allons sortir de ce guêpier dans 3 mns et que nous survolerons Alès. C’est fini. D’un seul coup la vallée du Rhône apparaît avec sa multitude de villes et villages éclairés. La visi est fantastique. Le silence nous surprend.

Je me retourne et je vois d’où nous sortons. J’ai l’impression de sortir de l’enfer….

Pendant quelques instants, Marc et moi restons muets. Un peu pâles quand même, je dis à Marc « il était costaud le bougre ».

Nous quittons Istres en les remerciant et nous passons avec Marseille

Tout est redevenu calme. Je rebranche le PA  et me dirige vers MTL. La nuit est belle , le moteur  ronronne comme un gros matou.  Nous avons déjà oublié ce mauvais moment  qui contrairement à ce que je pensais  n’a duré que 20 mns,  Pour mon premier voyage en IFR j’ai été servi !!!!

J’avais déjà raconté ce vol sur l’ancien forum de la FNA.


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[Bernard Ripoll]

La semaine prochaine à Biarritz, ce sera beaucoup moins mouvementé

[Papa-Hotel]

Oui, bon moi, je me contenterai de l'IFR de beau temps aucune envie de vivre ce que tu as vécu !!!
Par contre, le récit est intéressant !

Vive le VFR !!!

[Leon Robin]

TS.prêt pour alignement et décollage

TS, une immatriculation prédestinée à cette situation !

[Emmanuel C]

Salut Bernard,

Je suis passé à coté de ce récit sur l'ancien forum. Merci de nous l'avoir remis. Pour une première
Juste une question concernant :
"Marc pousse l’hélice plein petit pas, tire le réchauffage carbu,  branche le Tube Pitot et ferme les volets de capot"
Tirer la réchauffe, je comprend, brancher le chauffage pitot aussi, mais je n'aurait pas penser à passer en petit pas. D'ailleur qu'elle en est la raison ?

Emmanuel C.
Béotien sur ce coup

[bernard.boin]

tu as plus de puissance en passant plein petit pas,car il faut de la puissance pour contrer les dégueulantes.

Disons que plein petit pas c'est comme la première dans une voiture ,essaie de démarrer en cote en troisième.

[Emmanuel C]

, Pfff, Mais oui !! Quel ane....

[andre44]

Bonjour

tu as plus de puissance en passant plein petit pas,car il faut de la puissance pour contrer les dégueulantes.

Disons que plein petit pas c'est comme la première dans une voiture ,essaie de démarrer en cote en troisième.

Sur un Cessna 180 hydravion au décollage c'est plein petit pas  (certain on modifié les limites, on ne doit pas le dire) pour monter dessus de 2800rpm avec une hélice bipale de 2,14m c'est musical  
Plus on peut faire monter le régime plus on sort de la puissance du moteur sauf que dépasser le rouge la vie du moteur se raccourcie  
Un PA18 avec une hélice a pas plus fin, plein gaz en palier vas plus vite que avec une hélice standard a plus grand pas
C'est encore ancré dans l'esprit des pilotes, poigner a gaz au font (papillon grand ouvert) égale pleine puissance
C'est faux , la pleine puissance transmise sur l'hélice est atteinte quand on arrive a  faire tourner le moteur dans le rouge papillon grand ouvert. La pleine traction cela prend une hélice qui fait peu de glissement grande ou large

L'expression 60% ou 75% de la puissance ne corresspond pas uniquement aux rpm d'un moteur cela dépend aussi de la charge du moteur.

ferme les volets de capot"

Quand on vole dans une forte pluie, ou neige, la températuredes cylindres baisses ,il est preferable de garder les culasse chaudes pour l'encrassement des bougie.

Pour le pare brisse des Cessna 182 c'est du plexiglas de 1/4 soit 6,3 mm  C'est la que l'on constate que l'eau s'infiltre par des trous que l'on aurrait jamais supconé ..  
     

André

[Damien Chastan]

18 h30 – la nuit est tombée. Mise en route.

Bonjour Bernard,

Juste une question de curiosité. Ca me paraît tôt 18h30... En 1985, le changement d'heure intervenait plus tôt dans l'année ? J'ai plus souvenir car encore en culottes courtes

[VzMax]

IFR + orages prévus + pas de radar ou stormscope + partir en vol, c'est au-delà de l'audacieux.
L'avantage, c'est que ça fait un souvenir fort, et que ça dissuade de recommencer ! Et le recit dissuadera peut-être d'autres pilotes de s'y risquer…

[VzMax]

18 h30 – la nuit est tombée. Mise en route.

Bonjour Bernard,

Juste une question de curiosité. Ca me paraît tôt 18h30... En 1985, le changement d'heure intervenait plus tôt dans l'année ? J'ai plus souvenir car encore en culottes courtes 

1830Z ?

[Damien Chastan]

1830Z ?

Là par contre, ça fait pas un peu tard ? Quoique.....

Effectivement, si c'est ça, Bernard, tu as oublié le Z

[bernard.boin]

Mis en route a 18.30 local.Mais apres chauffage moteur,clairance ,check list,Le ciel est sombre car l'orage arrive.disons

qu'il était 18.45hrs.

J'ai écris que c'était mon 1er vol de nuit en I F R.et sur un monomoteur.Mais j'ai connu d'autres vols de nuit notamment

pendant mon service dans l,armée de l'air en afrique et dans l'océan indien,notament dans la boite a cunimbs ,surnom

donner au noratlas,mais la comme disait Kypling c'est une autre histoire.

[Bernard Ripoll]

En tous cas ,notre ami Bernard gardera un bon souvenir du pays basque
que nous avons survolé aujourd'hui au dessus et au dessous des nuages....