Souvenirs de môme ?...
En 1964, nous avons suivi mon ingénieur de père, nommé en Algérie pour la construction du gazoduc Hassi Messaoud, Hassir'mel - Arzew. J'avais 3-4 ans et ce fut mon premier contact avec l'aéronautique : embarquement à Orly à bord d'une Caravelle d' Air France... Pendant près de 6 ans , j'ai traversé la méditerranéée environ 4 fois par an dans les 2 sens à bord de La merveille aéronautique de l' époque, sous les couleurs d' Air France, ou d' Air Algérie, et ma passion aéronautique a forcement debuté comme cela !.... A l'époque Air France baptisait ses avions avec des noms de provinces francaises pour les caravelles et des noms de Chateaux de la renaissance pour ses 707. Je les connaissais presque toutes par cœur : Alsace, Provence, Poitou, Comté Venaissin, j'ai apris ma géographie francaise un peu comme cela.
Je remplissais mes premiers cahier d'écolier de dizaines de dessins de Caravelle ( elle était assez facile à dessiner, davantage que le 707 !). et à la manière des marmots de la génération suivante avec leurs vignettes de foot Panini, je compulsais religieusement les immats , dont je garde encore le souvenir F-BHRB, C....etc..
je garde encore des souvenirs olfactifs et sonores très vivaces de ces épisodes : la flagrance tres particulière des cabines, mélange de plastique, de tissu traité anti feu, de liquide hydraulique et de d'appareils électriques sous tension... indescriptible mais inoubliable ! Je tentais à chaque voyage un numéro de charme auprès des hotesses ( lors de la distribution des bonbons au decollage et a l'atterrissage, sensés nous forcer à mieux supporter une pressurisation pas encore très performante !) et je demandais à aller au poste, ce qui était presque toujours accordé. J'ai même le souvenir de quelques vols où j'ai passé de longues minutes sur les genoux des OMNs ( non, je vous vois venir, aucun rapport avec les bonbons !!...
) à m'emerveiller de cet antre, etroit, un peu sombre, et éminemment encombré de pendules, boutons et voyants qu'était un cockpit de caravelle III . Je garde le souvenir du silence impressionnant qui y régnait ( juste un sifflement aerodynamyque) au regard du raffut épouvantable en cabine, notamment si vous etiez assis à l'arrière à proximité des Rolls Royce Avon ... l'acces à bord par la passerelle arrière était également quelque chose de tres marquant : traversée à pied du parking dans le vent, le bruit et les odeurs de kéro brulé, inoubliable !....
Mon second contact avec le monde de l'aviation se fit à la même époque par le biais des petits avions: Un collègue de mon père s'occupait de l' Aeroclub de Tiaret, et possedant un Jodel. Il fut mon parrain aeronautique en me faisant faire mes premiers vols sur Tagazou. Je n'ai pas le souvenir precis de son Jodel, je me rappelle juste que j'étais installé derrière les pilotes dans un minuscule petit siège unique au milieu. Dans un coin de parking de l'aeroclub, gisait une épave d'un biplan en tandem ( Stampe ? ) qui faisait la joie des moutards et je ne compte plus les dizaines d'heures que j'ai du passer assis dedans à rêver de combats aériens ou de raids lointains !
Mais le meilleur restait à venir: face à la necessité pour les ingénieurs de se rendre plusieurs fois par mois sur les différents sites de pompage et de recompression, séparés de plusieurs centaines de km de route ou de pistes pas toujours accueillantes ( même pour les légendaires 403 et 404 Pijot! ) la société qui employait mon père décida d'acheter ou de louer des avions légers et d'embaucher un pilote professionnel.
Ce fut d'abord un Cherokee 6 , remplacé quelques années plus tard par un Aztec. Vous devinez la suite: des que cela était possible (congés scolaires ou jeudi) mon cher Papa m'embarquait pour sa tournée technique. Il s'installait avec ses dossiers à l'arrière et je trônais en place droite du pilote, (un immense Tchécoslovaque, ancien champion de voltige aerienne sur Zlin, qui m'avait à la bonne et me laissait " tenir le manche" en croisière , en me laissant croire que je pilotais !...) Je peux vous dire que dans la cour de récré le lendemain, j'avais du lourd à raconter !... Je garde encore présent ces images fabuleuses d 'atterrissage sur des pistes de sable en plein desert dans le grand sud algérien, Laghouat, Colomb Bechar, et des retours vers Oran, Arzew avec des couleurs de coucher de soleil gravées à jamais dans mon ame d'enfant.
Ce furent des années de cocagne qui ont forgé définitivement ma passion aéronautique. Pour autant , et contre tout attente, je n'embrasserai pas la carrière aéronautique : un petit problème ophtalmo ( qui ne serait plus redhibitoire à l'heure actuelle) ayant définitivement clos la question quant à mes chances d'obtenir une Classe 1. Mais cela ne m'empeche heureusement pas de pratiquer l'aviation légère avec passion depuis plus de 36 ans et d'avoir transmis le virus à l'un de mes fils, qui débute dans la carrière...